L’une des qualités indiscutables de cette version 1977, tournée dans l’archipel des îles Vierges, réside sans doute dans la beauté des maquillages spéciaux, œuvre de Tom Burman et Dan Striepeke. Leurs travaux cosmétiques inventifs mixent habilement les morphologies de l’homme avec celles des taureaux, des tigres ou des loups. Il faut aussi reconnaître que l’approche tempérée du caractère docteur Moreau, si elle accuse une certaine « fadeur », permet tout de même d’approfondir les tourments d’un personnage qu’on a connu plus malsain et moins réfléchi. Le savant incarné par Lancaster se rapproche d’une certaine manière de celui imaginé originellement par Wells. Car ses expériences, plus liées à la génétique qu’à la chirurgie (signe des temps), sont censées, à terme, éviter les malformations et autres drames physiologiques générés par la nature. Mais la fin justifie-t-elle toujours les moyens ? Quelles que soient les adaptations – officielles ou officieuses – du roman, la réponse demeure invariablement négative. L’apprenti-sorcier jouant avec Mère Nature est rarement bien loti en pareil contexte, d’autant que, comme l’affirmera avec cynisme l’un des slogans de Re-Animator, « Dieu a horreur de la concurrence ». Pour enfoncer le clou, Montgomery (Nigel Davenport), le cynique compagnon de Moreau, surnomme d’ailleurs son île « le jardin d’Eden ».
© Gilles Penso