ROBOCOP 2 (1990)

Le réalisateur de L’Empire contre-attaque prend la relève de Paul Verhoeven pour cette suite qui met en scène un robot psychopathe très impressionnant…

ROBOCOP 2

 

1990 – USA

 

Réalisé par Irvin Kershner

 

Avec Peter Weller, Nancy Allen, Dan O’Herlihy, Tom Noonan, Robert DoQui, Felton Perry, Tom Rosales

 

THEMA ROBOTS I FUTUR I SAGA ROBOCOP

A la fin des années 80, le succès de Robocop déclenche naturellement chez la compagnie de production Orion l’envie d’en tourner une suite. Paul Verhoeven étant parti filmer d’autres horizons futuristes avec Total Recall, c’est Irvin Kershner qui est chargé de le remplacer. Avec L’Empire contre-attaque et Jamais plus jamais dans sa filmographie, le cinéaste semble tout à fait à la hauteur. Si ce n’est qu’il est engagé quelques semaines seulement avant le début du tournage, après le départ précipité de Tim Hunter, le premier réalisateur pressenti. Avec en main un scénario à peine rédigé, le vénérable cinéaste craint de se laisser dépasser par la charge de travail. D’autant qu’il souhaite un peu édulcorer la violence présente dans le premier Robocop pour pratiquer un humour noir plus proche de celui d’une bande dessinée. La présence de Frank Miller à l’écriture le conforte dans cette idée. Kershner sait surtout qu’il peut s’appuyer sur le talent créatif de Phil Tippett, avec qui il collabora une décennie plus tôt sur L’Empire contre-attaque, et qui monte à l’occasion de Robocop 2 une équipe imposante afin d’englober l’énorme masse d’effets spéciaux requis par le film. Car si ED-209, l’opposant de Peter Weller dans le premier Robocop, était un monstre bipède tenant la vedette d’une poignée de séquences mémorables, son successeur est prévu pour être une machine beaucoup plus complexe.

Cette nouvelle créature métallique passe par de nombreux designs avant de trouver son look définitif, défini par l’artiste Craig Hayes. « Il est un peu inspiré des jouets japonais, notamment les robots Transformers, mais aussi du corps des bodybuilders et des armures médiévales », nous explique Phil Tippett. « Il est doté de quatre bras de tailles différentes montés sur une tourelle tournante, et chacun de ses membres peut s’articuler dans tous les sens. C’est un design particulièrement complexe. En fait, sa forme précise n’est pas lisible immédiatement. Il faut attendre quelques plans avant de comprendre à quoi il ressemble vraiment. Et il a un plus gros potentiel effrayant que ED-209, qui prêtait parfois à rire » (1). À ce physique cauchemardesque s’ajoute un comportement effrayant, dans la mesure où ce robot possède le cerveau d’un criminel psychopathe nommé Cain (et incarné par Tom Noonan, le serial killer du Sixième sens). Le monstre intervient dans une série de séquences incroyables repoussant les limites de ce qui avait été fait jusqu’alors dans le domaine de la stop-motion. Sa première apparition se situe dans un hangar sombre, les jeux d’ombres laissant encore planer un doute sur sa morphologie précise. La séquence est extrêmement dynamique, mais ce n’est rien à côté du climax du film qui décrit l’affrontement homérique entre Robocop et Cain et multiplie jusqu’à l’excès les impacts de balle et les destructions. Tout au long de ces folles séquences, Phil Tippett et son équipe réussissent à faire passer toute une gamme d’expressions dans cet amas sauvage de métal : la surprise, l’envie, la satisfaction, la colère…

Métal hurlant

Grâce au savoir-faire et à l’inventivité de Tippett, qui assure aussi la réalisation de deuxième équipe et gère seul toutes les scènes à effets spéciaux, Kershner peut se concentrer sur les comédiens malgré les délais très serrés qui lui sont impartis et parvient presque à calquer son style sur celui de Paul Verhoeven. La satire sociale est toujours aussi cinglante, la violence visuelle guère édulcorée, mais il manque au film une vision et une singularité. Kershner n’ayant pas eu le temps d’apposer un point de vue vraiment personnel sur le sujet, Robocop 2 sent un peu la redite. Le guet-apens tendu à Robocop et son démembrement remplacent ainsi la mise à mort d’Alex Murphy dans le premier film, Tom Noonan reprend le rôle du gangster tenu précédemment par Kurtwood Smith, les spots publicitaires et les flashs d’information n’ont pas changé de ton… Bref, nous sommes en terrain connu. Seule véritable nouveauté : Robocop, reprogrammé, se transforme en boy-scout caricatural et ridicule. Reste également la patte Frank Miller et quelques extravagances qui semblent directement issues des pages d’un comic book, comme ce cerveau et cette moelle épinière flottant dans un bocal. Dommage, par exemple, que cette suite n’ait pas plus creusé les possibilités d’humanisation que laissaient espérer les scènes du début. Au jeu de la comparaison, Robocop 2 ne fait donc pas le poids face à son prédécesseur. Mais la folle ambition de ses séquences d’action, la redoutable monstruosité de son super-vilain mécanique et sa description désenchantée d’une société à peine futuriste gangrénée par la corruption sont d’inestimables atouts qui le placent au-dessus du lot… surtout si l’on tient compte du dérisoire Robocop 3.

 

(1) Propos recueillis par votre serviteur en avril 1998

 

© Gilles Penso

 

Complétez votre collection


Partagez cet article