AU-DELÀ DE NOS RÊVES (1998)

Robin Williams traverse les étendues surréalistes de l’au-delà pour tenter de sauver l’âme de son épouse passée de vie à trépas…

WHAT DREAMS MAY COME

 

1998 – USA

 

Réalisé par Vincent Ward

 

Avec Robin Williams, Annabella Sciorra, Max Von Sydow, Cuba Gooding Jr., Jessica Brooks Grant, Josh Paddock, Rosalins Chao, Lucinda Jenney

 

THEMA MORT

A quoi peuvent bien ressembler le Paradis et l’Enfer ? Le cinéaste néo-zélandais Vincent Ward, à qui nous devons le récit de voyage temporel Navigator, décide de répondre à cette question métaphysique en adaptant le roman « Au-delà de nos Rêves » de Richard Matheson paru en 1978. Le titre du livre (que reprend le film) est emprunté au célèbre monologue d’« Hamlet ». Il est bien question d’être ou de ne pas être dans cette fable douce-amère faisant du deuil le moteur de son intrigue. Le scénario de Ronald Bass fait subir au roman initial un grand nombre d’outrages pour pouvoir se conformer à une vision moins dure et violente de l’au-delà, conformément aux désirs de Vincent Ward. Comme souvent, l’écrivain s’avouera déçu de cette adaptation, ne cessant de demander pourquoi les producteurs ne se sont pas contentés de « filmer son livre » au lieu de le trahir. Robin Williams et Annabella Sciorra, qui jouaient déjà ensemble dans Cadillac Man, se retrouvent en tête d’affiche d’Au-delà de nos rêves.

La star du Cercle des poètes disparus incarne Chris Nielsen, un pédiatre qui s’amourache de l’artiste Annie Collins (Annabella Sciorra) avec qui il a une fille et un garçon. Mais le conte de fée idyllique vire à la tragédie quand les deux enfants meurent dans un accident. La famille est encore marquée par le destin lorsque Chris est tué à son tour quatre ans plus tard dans un accident de voiture. Désormais pensionnaire de l’au-delà et guidé par un ange-gardien campé par Cuba Gooding Jr, Chris se met en quête d’Annie qui, folle de désespoir, s’est suicidée. Perdue dans les limbes du royaume d’Hadès, aura-t-elle la possibilité de réintégrer des cieux plus cléments grâce à l’amour de son époux ? On le voit, la thématique d’Orphée plongé dans les Enfers pour ramener sa bien-aimée est très prégnante dans ce récit tourmenté et fait écho par moments à Quelque part dans le temps qui, lui aussi, s’inspirait d’un récit de Matheson pour s’efforcer de braver l’inéluctabilité de la mort.

Le nouvel Orphée

Porté par l’interprétation à fleur de peau de Robin Williams et truffé d’effets visuels haut de gamme, le film nous offre d’abondants décors surréalistes, du vaste palais victorien à la librairie cyclopéenne et vertigineuse en passant par le cimetière des épaves de navires ou encore les visages des âmes damnées qui jonchent le sol des Enfers…  Visuellement, Au-delà de nos rêves est une merveille, donnant corps à des tableaux surréalistes plus somptueux les uns que les autres (en accord avec la vision de l’au-delà que pourrait construire mentalement un homme éperdument amoureux d’une artiste peintre). C’est à juste titre que les effets visuels du film furent récompensés par un Oscar. On appréciera aussi la prestation très symbolique de Max Von Sydow qui, après avoir affronté la Mort dans la mémorable partie d’échecs du Septième sceau, devient ici le Passeur d’une rive à l’autre, nouvelle incarnation du Charon de la mythologie grecque. Tous ces beaux ingrédients donnent pourtant un plat très indigeste, qui commet l’erreur d’une moralisation extrême et d’une approche trop frontalement judéo-chrétienne, atténuant du coup grandement son impact. Le film aura d’ailleurs du mal à rembourser son budget de 85 millions de dollars, n’attirant pas autant de spectateurs que prévu malgré de nombreux remaniements du montage suite à des projections test décevantes.

 

© Gilles Penso

 

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