DOGORA (1964)

Le créateur de Godzilla lâche sur la population une menace d’un nouveau genre en perpétuelle mutation…

DOGORA

 

1964 – JAPON

 

Réalisé par Inoshiro Honda

 

Avec Yosuke Natsuki, Yoko Fujiyama, Akiko Wakabayashi, Hiroshi Koizumi, Jun Tazaki

 

THEMA CATASTROPHES

A contre-courant des films de monstre bon enfant que la compagnie japonaise Toho produisait depuis le début des années 60, Dogora s’avère plus noir et plus réaliste que les combats de catch préhistoriques réalisés la même année par Inoshiro Honda (Mothra contre Godzilla, Ghidrah le monstre à trois têtes). Cette œuvre étrange mêle la science-fiction et le genre catastrophe à une intrigue policière empruntant ses effets de style au thriller et au film d’espionnage. Nous faisons ainsi connaissance avec un gang de voleurs de bijoux (illuminé par la magnifique et vénéneuse Akiko Wakabayashi) qui visent les plus grandes réserves de joyaux du pays, mais sont régulièrement coiffés au poteau par des rivaux inconnus. Leurs concurrents, capables d’atteindre les coffres forts sans se faire repérer, de franchir les issues sans déclencher les alarmes et de faire disparaître leur butin sans laisser de trace, ne sont tout simplement pas des humains. Il s’agit de « cellules spatiales » (équivalent cosmique des cellules du cerveau humain) nées suite à des expériences nucléaires. Elles absorbent tout le carbone de la Terre (diamants, charbon) et l’humanité n’y survivra pas si la menace n’est pas éradiquée.

En lieu et place des habituels gros monstres malmenant buildings et véhicules de l’armée, le roi des effets spéciaux Eiji Tsuburaya concocte ici des visions quasiment surréalistes : un amibe spatial qui absorbe un satellite, des hommes et des voitures soumis soudain à l’apesanteur, une usine dont la structure se brise en mille morceaux pour voltiger ensuite vers le ciel comme attirée par un aimant géant, des masses nuageuses surnaturelles emplissant les cieux au-dessus de la cité, des nuées de charbon s’envolant tels des essaims d’insectes… Lorsque la menace prend corps, elle apparaît aux yeux des humains sous forme d’une gigantesque méduse translucide, laquelle finit par se subdiviser en une infinité de sœurs jumelles. Cette créature protéiforme est l’une des plus belles réussites de Tsuburaya, lequel recourt parfois au dessin animé pour visualiser l’action de ses tentacules. Les Japonais mettant un point d’honneur à nommer tous les monstres qui les attaquent (depuis le premier Godzilla, ils en ont pris l’habitude !), celui-ci se voit baptiser « Dogora », du nom de la première ville victime de ses méfaits.

Visions d’apocalypse

Les séquences de destructions finales s’avèrent franchement spectaculaires, avec comme point d’orgue un pont suspendu violemment arraché du sol qui finit par s’effondrer dans un port. Comme toujours, l’armée s’avère inefficace, les tirs de canons et les lance-roquettes ne parvenant qu’à éloigner la menace provisoirement, et l’on vient finalement à bout du monstre à l’aide de venin de guêpe, seule substance capable de l’éliminer en le cristallisant. Le climax de Dogora, mémorable, montre ainsi les morceaux solidifiés de la créature s’écrasant un peu partout sur Terre, tandis que gangsters et policiers échangent maints coups de feu sur une plage bientôt muée en décor apocalyptique. Du coup, l’un des derniers plans du film, servi par de remarquables effets visuels, montre le gang patibulaire littéralement aplati par un gigantesque rocher tombé du ciel !

 

© Gilles Penso

 

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