Malheureusement, les intentions de Wes Craven ne sont pas forcément en accord avec celles de la Paramount ou avec celles du comédien vedette. Le studio cherche avant tout à produire un film comique pour capitaliser sur la popularité d’Eddie Murphy (qui joue d’ailleurs ici plusieurs rôles, comme dans les comédies qu’il interprète sous la direction de John Landis). Murphy, lui, n’accepte de jouer dans le film qu’à condition que le studio ne lui cède les droits du remake de Docteur Jerry et Mister Love de Jerry Lewis, qui deviendra Le Professeur Foldingue. Difficile dans une telle situation d’imposer une vision forte, une empreinte personnelle, un esprit singulier. Un Vampire à Brooklyn est donc un film hybride, au sein duquel la comédie, l’horreur, la romance et la satire sociale entrent en conflit sans vraiment s’harmoniser. Car chacun souhaite sortir de sa propre zone de confort sans faire concilier ses envies avec celle des autres. Murphy veut jouer le vampire de la manière la plus sérieuse possible (malgré cette perruque ridicule qu’il semble avoir volée à Barry White !), Craven souhaite au contraire capitaliser sur l’humour que dégage le comédien, et finalement le film n’est ni drôle ni effrayant. Cette erreur de parcours sera sanctionnée par des critiques assassines et un résultat décevant au box-office. Mais Un Vampire à Brooklyn aura tendance à être réévalué à la hausse quelques années plus tard.
© Gilles Penso