CALVAIRE (2004)

Un chanteur trouve refuge en pleine campagne chez un aubergiste psychopathe qui lui fait subir les derniers outrages…

CALVAIRE

 

2004 – FRANCE / BELGIQUE / LUXEMBOURG

 

Réalisé par Fabrice du Welz

 

Avec Laurent Lucas, Jackie Berroyer, Philippe Nahon, Jean-Luc Couchard, Brigitte Lahaie, Gigi Coursigni, Philippe Grand’Henry

 

THEMA TUEURS

Dire que Délivrance et Massacre à la tronçonneuse sont les références absolues en matière de survival est une cause entendue. Faut-il pour autant que le cinéma de genre francophone se sente obligé de restreindre ses références à ces deux seules œuvres ? Haute tension, Sheitan, Frontières… Tous paient leur tribut à John Boorman et Tobe Hooper avec un talent très variable. Premier long-métrage de Fabrice de Welz, Calvaire n’échappe pas à la règle, reprenant à son compte tous les clichés inhérents à cette double influence sans chercher spécialement à en extraire autre chose qu’une atmosphère malsaine et des péripéties glauques. Dès les premières minutes, le réalisateur met en place un climat inconfortable. Ses mouvements de caméra accidentés et son image granuleuse s’attardent sur une poignée de retraités cafardeux rivant leur regard sur Marc Stevens (Laurent Lucas), un chanteur mondain au petit numéro bien rôdé. Tous les désespérés semblent se raccrocher à lui comme à une bouée de sauvetage : une vieille dame émoustillée lui fait les yeux doux, l’infirmière gironde (Brigitte Lahaie) lui glisse des photos dénudées d’elle-même, mais ce n’est rien à côté de ce qui attend notre infortuné protagoniste.

Sur la route qui le mène vers un gala, il se perd dans une forêt embrumée et tombe en panne en pleine nuit, sous une pluie battante. C’est dans l’auberge de Paul Bartel (hommage au réalisateur de La Course à la mort de l’an 2000) que Stevens trouve refuge. Bartel, qu’interprète un Jackie Berroyer tout à fait étonnant, est un ancien humoriste qui ne s’est toujours pas remis du départ de sa femme Gloria. Malgré sa bonhomie et ses airs avenants, une sensation de malaise persistante s’installe dès sa première apparition. La longue conversation qu’il a avec Marc, tandis que celui-ci prend son repas, est d’ailleurs calquée plan par plan sur une scène équivalente de Psychose, Berroyer jouant le rôle d’Anthony Perkins et Lucas celui de Janet Leigh. La psychopathie de Bartel se révèle pleinement lorsqu’il met le feu à la camionnette de Marc, l’assomme, l’habille avec une robe de sa femme, le tond et l’appelle désormais Gloria. Car le chanteur de charme focalise une fois de plus les fantasmes de son entourage, au mépris de toute logique et de toute raison.

France profonde

La France profonde que nous décrit Calvaire n’a aucun sens. Les villageois confondent chiens et vaches, ont des rapports sexuels avec les cochons, se livrent à d’improbables chorégraphies dans les bars… Faut-il y lire du surréalisme ? Du cynisme ? Un simple goût pour l’absurde ? Difficile de se prononcer. Au milieu de cette dégénérescence, Laurent Lucas joue avec son apathie habituelle, qui était efficace dans Harry un ami qui vous veut du bien mais s’avère ici rapidement irritable. Passif au-delà de tout, pleurnichard, il n’engendre guère l’empathie et ne construit aucune évolution émotive. Il geint dès le début de son martyre et se contente de cette palette monochromatique, même dans les moments les plus intenses (comme lorsque Bartel le crucifie !). L’assaut final vire au n’importe quoi (on hurle, on se tire dessus, on se sodomise !) et la chute, en queue de poisson, confirme le caractère vain de l’entreprise.

 

© Gilles Penso

 

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