13 SINS (2014)

Un homme qui croule sous les dettes se voit proposer par un interlocuteur mystérieux un jeu étrange qui vire au sordide puis à l’horreur…

13 SINS

 

2014 – USA

 

Réalisé par Daniel Stamm

 

Avec Mark Webber, Devon Graye, Tom Bower, Rutina Wesley, Ron Perlman, Pruitt Taylor Vince, George Coe, Clyde Jones, Deneen Tyler, Tom Lawson Jr, Donny Boaz

 

THEMA TUEURS

Grâce à son faux documentaire A Necessary Death produit avec les moyens du bord, le jeune réalisateur d’origine allemande Daniel Stamm parvient à se frayer un chemin à Hollywood et se voit confier aussitôt le found footage Le Dernier exorcisme. Dans la foulée de ce joli succès, le voilà à la tête de 13 Sins, un projet surprenant à mi-chemin entre la comédie, le drame, le thriller et l’horreur. Remake américain du film thaïlandais 13 jeux de mort, 13 Sins est co-écrit par David Birke, qui rédigera plus tard pour Paul Verhoeven les scénarios de Elle et Benedetta. Le film nous saisit d’emblée par un prologue choc gorgé d’humour noir, précédant un générique très graphique bourré d’indices énigmatiques, aux accents d’une musique nerveuse et agressive de Michael Wandmacher (Piranha 3D). Sans connexion apparente avec ce qui vient de se dérouler en tout début de métrage – une sorte de dîner de gala qui s’achève dans un bain de sang -, l’intrigue de 13 Sins s’installe à la Nouvelle-Orléans. Elliot (Mark Webber), un trentenaire tranquille dont la fiancée Shelby (Rutina Wesley) est enceinte, vient d’être licencié. Motif : il est trop gentil, trop empathique, pas assez agressif. Son frère Michael (Devon Graye), déficient mentalement, a besoin de soins coûteux. Leur père (Tom Bower), un homme aigri, croule lui-même sous les dettes. Bref, l’entame de 13 Sins nous décrit une lente mais inexorable déchéance sociale. Mais ce n’est rien à côté de la descente aux enfers qui est sur le point de s’opérer.

Un soir, alors qu’il est seul dans sa voiture, Elliot reçoit un coup de fil étrange. À l’autre bout du fil, une voix enjouée et sympathique lui propose de participer à un jeu en échange de sommes d’argent virées directement sur son compte. Elliot s’apprête à raccrocher, mais le mystérieux interlocuteur semble tout savoir de lui. La première épreuve est simple : s’il tue la mouche qui est en train de voleter dans sa voiture, il empochera mille dollars. Elliot s’exécute et l’argent est aussitôt accrédité auprès de sa banque. Notre homme n’en croit pas ses yeux. Mais ce défi n’est que le premier d’une série de treize. Et bien sûr, les choses vont bientôt dégénérer. Ce qui commence comme une mauvaise blague finit par prendre une tournure de plus en plus malsaine, jusqu’à atteindre un point de non-retour et basculer dans l’horreur.

Le jeu de la mort

13 Sins tire son efficacité de sa capacité immédiate à nous faire entrer en empathie avec son personnage principal. Ce mécanisme d’identification permet aux spectateurs de partager sa gêne, son malaise, puis son effroi et sa panique. Mark Webber s’avère très convaincant dans la peau de cet homme ordinaire dont le défaut majeur est d’être trop attentionné, d’avoir trop de compassion, et qui va devoir lutter contre sa propre nature pour tenter de sauver la situation. Haletant, cet engrenage infernal pourrait s’appréhender comme une parabole du surendettement, cette spirale infernale qui fait perdre pied et empêche progressivement toute machine arrière, jusqu’à la rupture. A la lisière permanente du surnaturel, cette voix énigmatique qui ne cesse d’inciter Elliott à oublier ses réflexes premiers pour basculer dans le mal pourrait tout aussi bien être celle du diable lui-même. Ce qui nous ramène au Dernier exorcisme, le film précédent de Stamm. « Ce qui me plaît dans les films d’exorcisme, par rapport aux autres films d’horreur, est l’idée que la menace vient de l’intérieur », explique-t-il à ce propos. « Vous ne pouvez pas couper la tête du tueur et vous débarrasser du mal. Le mal est en vous. Or d’une certaine manière, 13 Sins aborde le même thème. Il y a une voix mystérieuse qui s’adresse au héros – en l’occurrence à travers un téléphone – pour le tenter d’agir de manière terrible, de lutter contre ce qu’il est réellement et de révéler ses plus bas instincts. C’est très proche des films de possession. » (1) Et tandis qu’un inspecteur de police opiniâtre campé par Ron Perlman mène l’enquête, cette question entêtante raisonne avec de plus en plus d’insistance tout au long du film : peut-on transformer n’importe qui en monstre ?

 

(1) Propos recueillis par votre serviteur en janvier 2022.

 

© Gilles Penso

 

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