ELECTRO-CHOC (1979)

Accusée à tort du meurtre d’une famille, une chanteuse échoue dans une prison où un savant se livre à d’inquiétantes expériences…

HUMAN EXPERIMENTS

 

1979 – USA

 

Réalisé par Gregory Goodell

 

Avec Linda Haynes, Geoffrey Lewis, Ellen Travolta, Aldo Ray, Jackie Coogan, Lurene Tuttle, Mercedes Shirley, Bobby Porter, Darlene Craviotto

 

THEMA MÉDECINE EN FOLIE

Avec Human Experiments, Gregory Goodell effectue son baptême de metteur en scène et de scénariste avec un certain panache, d’autant que ce sera son seul film conçu pour le cinéma, ses autres œuvres étant destinées aux petits écrans. Pour cette œuvre unique, qui semble à priori emprunter les sentiers balisés des films d’exploitation de la décennie précédente, Goodell nous prend par surprise. L’entame a les allures d’une chronique désenchantée de l’Amérique profonde. Linda Haynes incarne Rachel Foster, une chanteuse de country qui voyage seule à travers les États-Unis pour se produire dans de petits établissements souvent minables où elle doit composer avec des salaires dérisoires, des hôtels miteux et des employeurs lubriques. Rachel conserve malgré tout son sang-froid et une certaine bonhomie qui la pousse à répéter ses chansons au volant, le volume à fond. Son passé nous est inconnu, sa vie intime réduite à peau de chagrin. Visiblement solitaire, elle vit l’instant présent. Et c’est justement en égrenant des événements s’enchaînant au fil d’une chronologie imprévue mais implacable que se construit le scénario de Human Experiments (qui fut tourné sous le titre provisoire Beyond the Gate), œuvre du presque débutant Richard Rothstein. Dans sa hâte de quitter la dernière bourgade en date où elle vient de se produire, Rachel est victime d’un accident sur la route. Cherchant de l’aide, elle trouve ce qui semble être une maison abandonnée. Mais ce n’est qu’une apparence : un effroyable homicide multiple vient d’y être commis, et l’assassin est un enfant au visage renfrogné qui pointe un fusil dans sa direction. C’est le premier électro-choc d’un film au titre français finalement assez pertinent.

Si notre héroïne évite les balles de l’assassin en herbe, elle est en revanche accusée du massacre à sa place. Faute d’une défense solide et de preuves de sa bonne foi, elle atterrit donc dans une maison de correction. Là, Human Experiments opère donc un virage pour entrer dans les codes du film de prison de femmes. Mais ici aussi, les apparences sont trompeuses. Si tous les clichés d’usage semblent avoir été convoqués (les rivalités entre détenues, la tension avec les gardiennes, la nudité frontale, les scènes de plaisir solitaire), Gregory Goodell conserve une certaine retenue qui éloigne sa démarche de celle des productions « grindhouse » volontiers racoleuses. De fait, si la vie est loin d’être rose dans cet établissement pénitentiaire, les effectifs sont faibles, l’autorité s’y exerce sans cruauté excessive et les détenues semblent même bénéficier d’une certaine liberté de mouvement. Cette prison est pourtant loin d’être exemplaire. Car dans l’ombre, un archétype de savant fou pioche parmi les captives les cobayes de ses expériences contre-nature.

Expériences interdites

C’est là qu’Electro-choc plonge dans le fantastique, la science-fiction et l’épouvante. Mais la transition est progressive, insidieuse. Et si la menace nous est annoncée assez tôt, ses effets sur Rachel n’apparaissent que tardivement. Le savant en question est le docteur Hans Kline (excellent Geoffrey Lewis), un médecin aux méthodes révolutionnaire auquel le gouvernement a donné carte blanche en échange de résultats concrets. Il est en effet persuadé d’avoir trouvé le moyen d’éradiquer tout instinct criminel en altérant totalement la personnalité des détenues accusées de meurtres. Ses dernières expériences se sont soldées par des échecs, mais il tient bon, avec la complicité de moins en moins complaisante de la directrice de la prison. Or la prochaine patiente qu’il souhaite « traiter » est Rachel. Avant que l’horreur ne surgisse concrètement à l’écran – notamment dans une scène très éprouvante où grouillent soudain des centaines d’insectes, d’araignées, de scorpions et de mille-pattes – le malaise s’insinue sournoisement dans le film. C’est d’abord l’injustice de la situation qui nous frappe, doublé d’une totale absence de résistance qui pousse Rachel à se résigner immédiatement. Malgré son innocence, elle ne se révolte pas, acceptant son sort et provoquant chez le spectateur un profond sentiment de frustration. C’est le terreau idéal sur lequel va pousser le basculement vers la folie, jusqu’à un dénouement choc d’une délicieuse ambiguïté. Si Electro-choc est le titre français sous lequel Human Experiments est le plus connu (grâce à son exploitation en VHS), il fut également distribué sous un titre plus fidèle à l’original : Expérimentations humaines.

 

© Gilles Penso


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