LA LOUVE SANGUINAIRE (1976)

Hantée par une lointaine ancêtre, une jeune femme rêve toutes les nuits qu’elle se transforme en louve-garou assoiffée de sang…

LA LUPA MANNARA

 

1976 – ITALIE

 

Réalisé par Rino di Silvestro

 

Avec Annik Borel, Frederick Stafford, Tino Carraro, Andrea Scotti, Elio Zamuto, Ollie Reynolds, Tom Karnowski, Linda Harmon

 

THEMA LOUPS-GAROUS

La Louve sanguinaire s’efforce de traiter la lycanthropie sous l’angle de la pathologie tout en ne lésinant ni sur l’horreur graphique ni sur l’érotisme cru. Le film part donc sous d’excellents auspices. Hélas, Rino di Silvestro et son co-scénariste Howard Ross semblent avoir toutes les peines du monde à bâtir une intrigue cohérente et s’éparpillent un peu dans tous les sens. La scène d’introduction, très prometteuse, nous montre Annik Borel, nue comme un ver, qui s’adonne à une danse tribale autour d’un cercle de feu. Puis la pleine lune paraît dans le ciel nocturne. Aussitôt, la belle se mue en créature lupine couverte de poils à la mâchoire écumeuse garnie de dents acérées. Prise en chasse par les villageois (armés de torches comme il se doit), elle en tue un à coup de hache (avec un gros plan sur la plaie ensanglantée s’il vous plaît) puis est capturée et promise au bûcher. Mais tout ceci n’est qu’un rêve. Celui de Daniela, une jeune femme obsédée par une ancêtre accusée de lycanthropie à qui elle ressemble comme deux gouttes d’eau. Non contente de porter le poids de cet héritage complexe, elle est traumatisée par un viol qu’elle a subi dans sa prime jeunesse. Autant dire que Daniela n’est pas très équilibrée, considérant le sexe opposé d’un œil très circonspect. Ses cauchemars prennent du coup une tournure très graphique, notamment lorsqu’elle imagine que de gros reptiles rampent nuitamment sur son corps dénudé.

Une nuit, prise de sentiments contraires et hantée par la vision bestiale de son aïeule, Daniela séduit le fiancé de sa sœur (après avoir épié leurs ébats à la manière de la Catherine Deneuve de Répulsion) puis lui dévore la gorge avant de jeter son cadavre dans un ravin. Dans la foulée de cette mise à mort brutale, l’intrigue s’intéresse à une série de meurtres du même acabit et s’attarde sur des personnages secondaires sans grande envergure : le père de Daniela qui se lamente, le médecin qui échafaude des théories psychanalytiques et l’inspecteur de police qui mène l’enquête. Après s’être échappée de l’hôpital psychiatrique dans lequel elle était soignée en vain (et où elle passait ses soirées à errer dans les couloirs en nuisette, une grosse paire de ciseaux à portée de main au cas où), Daniela se range un moment auprès d’un cascadeur et semble enfin trouver son équilibre, comme le montrent quelques jolies saynètes béates au ralenti (avec plage de sable fin et coucher de soleil !).

Le viol du lycanthrope

Ne sachant visiblement plus comment rebondir, le scénario de La Louve sanguinaire vire subitement au « rape and revenge ». Daniela est donc violée par trois hommes qui pénètrent dans sa maison (façon Les Chiens de paille) puis se venge violemment de chacun d’entre eux (à la manière de l’héroïne de I Spit on Your Grave). Rattrapée par la police, elle est finalement arrêtée manu militari, tandis qu’une voix-off sentencieuse nous laisse entendre qu’il s’agit d’une histoire vraie et que les noms ont été changés pour protéger les innocents. Incapable de trancher entre l’épouvante à l’ancienne, le gore façon « exploitation picture » des années 70 et l’étude psychanalytique, le film s’égare dans les méandres de ses péripéties et peine à capter correctement l’attention de ses spectateurs, malgré les déshabillages fréquents et généreux de son actrice principale qui fait de son mieux pour garder les sens du public en éveil. Vingt ans après sa réalisation, La Louve sanguinaire bénéficiera d’un regain d’intérêt auprès d’une nouvelle génération de spectateurs lorsque Quentin Tarantino le désignera comme l’un de ses films culte.

 

© Gilles Penso


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