HISTOIRES DE FANTÔMES CHINOIS (1987)

De la romance, des spectres, des combats en apesanteur, de l’humour et des chansons sont au menu de ce cocktail délirant made in Hong-Kong…

A CHINESE GHOST STORY / CH’IEN-NU YU-HUN

 

1987 – HONG-KONG

 

Réalisé par Ching Siu-Tung

 

Avec Leslie Cheung, Joey Wong, Wu Ma, Wai Lam, Siu-Ming Lau, Zhilun Xue, Jing Wong, David Wu, Ha Huang, Yau Cheung Yeung, Mei-Yee Sze

 

THEMA FANTÔMES I SAGA HISTOIRES DE FANTÔMES CHINOIS

À partir de la fin des années 70, Tsui Hark ravale spectaculairement la façade du cinéma de Hong-Kong à travers des films aussi marquants que The Butterfly Murders (1979), Histoire de cannibales (1980), L’Enfer des armes (1980) ou encore Zu, les guerriers de la montagne magique (1983). En 1986, il devient producteur de John Woo à l’occasion du Syndicat du crime et prépare dans la foulée Histoires de fantômes chinois. Ce dernier projet, en développement depuis quasiment une décennie, adapte librement la nouvelle « L’étui merveilleux » issue du recueil « Histoires étranges » de Pu Songling publié au XVIIème siècle. L’autre source d’inspiration d’Histoires de fantômes chinois est le conte fantastique L’Ombre enchanteresse réalisé en 1960 par Han Hsiang Li, dont il reprend la trame principale et plusieurs éléments scénaristiques. La réalisation du film est confiée à Ching Siu-tung, grand spécialiste des cascades, des chorégraphies de combat et des séquences d’action, qui signe ainsi son troisième long-métrage en tant que metteur en scène après Duel to the Death et Qi yuan. Avec un tel homme derrière la caméra, le résultat s’annonce grandiose et ébouriffant.

Histoires de fantômes chinois s’intéresse à Lin Choi San, un jeune homme sans le sou qui tente de gagner chichement sa vie en collectant les impôts à travers les villages ruraux. Ce garçon timide et maladroit est incarné par Leslie Cheung, familier des productions Tsui Hark (Le Syndicat du crime I et II) et également chanteur à succès (c’est d’ailleurs lui qui interprète le générique du film). Alors qu’il trouve refuge dans un monastère sinistre, Lin rencontre un moine très étrange (Wu Ma), aussi adroit à l’épée que prompt à détruire les spectres. Inconscient du danger qui plane au-dessus de lui, Lin tombe amoureux d’une adorable jeune femme, Lip Siu Sin, incarnée par la toute belle Joey Wong (ancienne basketteuse professionnelle et mannequin reconvertie à la comédie). Mais sous cette apparence séduisante se dissimule un fantôme redoutable qui séduit les hommes pour les livrer ensuite en pâture à sa démoniaque matrone. Attendrie par l’innocence et la pureté de Lin, elle tombe à son tour amoureuse du garçon et décide de le protéger. Or les forces du mal rôdent dans les bois et elle-même est promise au monstrueux Seigneur Noir…

« Poyé Polomi ! »

Moine taoïste adepte des arts martiaux et des incantations explosives (« Poyé Polomi ! »), fantômes féminins, entités démoniaques, monstres multiformes, langues géantes, têtes flottantes, sabres volants, tentacules et murs hérissés de bras hantent ce film hallucinant dont l’une des particularités est de faire régulièrement défier à ses personnages les lois de la pesanteur. Loin des canons esthétiques du cinéma fantastique hollywoodien, Hong-Kong montrait alors à la face du monde la richesse et la folie de son folklore avec une énergie rafraîchissante. Pour autant, Histoires de fantômes chinois ne rechigne pas à citer ses sources occidentales. Il est par exemple difficile de ne pas penser à Evil Dead face à cette caméra qui rampe dans la forêt, cette cabane dans les bois, ces cadavres desséchés animés en stop-motion, ces arbres qui s’animent pour attaquer les vivants, cette forêt nocturne embrumée, ces monstres dans la cave ou ce livre d’incantations. Mais la manière inédite dont Tsui Hark et Ching Siu-Tung réinventent cette imagerie fait toute la différence. Comment ne pas se laisser séduire par la beauté étourdissante de Joey Wong et la candeur irrésistible de Leslie Cheung ? Comment ne pas s’enthousiasmer face à cette aventure fantasmagorique truffée de trouvailles visuelles et d’idées originales qui ose sans cesse le grand écart entre la romance, la comédie, le kung-fu et l’épouvante ? Prix spécial du jury au Festival international du film fantastique d’Avoriaz 1988, Histoires de fantômes chinois fit de nombreux émules et donna naissance à une véritable franchise (plusieurs longs-métrages et une série animée).

 

© Gilles Penso


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