EVIL DEAD (1981)

Avec ce premier long-métrage, Sam Raimi déclare son amour au cinéma d'horreur en le marquant d'un style très personnel

THE EVIL DEAD

1981 – USA

Réalisé par Sam Raimi

Avec Bruce Campbell, Ellen Sandweiss, Hal Delrich, Betsy Baker, Sarah York

THEMA ZOMBIES I DIABLE ET DEMONS I SAGA EVIL DEAD

Evil Dead est le premier et sans doute le meilleur film de Sam Raimi, le mètre étalon du cinéma d’épouvante des années 80, un véritable phénomène salué à l’époque par des commentaires dithyrambiques de Stephen King en personne. Et pourtant, qui aurait misé sur un scénario aussi basique et convenu ? Les protagonistes sont cinq amis (deux couples et une jeune femme un peu solitaire) qui ont loué une cabane dans la montagne. L’endroit est sinistre, recouvert d’une épaisse brume et envahi par une végétation très dense. Dans la cave de la maison, où l’horloge s’est subitement arrêtée, ils découvrent un vieux grimoire dont la couverture grimaçante semble être faite avec de la peau humaine, un gros magnétophone et une bande enregistrée par le dernier locataire. Celui-ci faisait des études sur la sorcellerie, et a vraisemblablement provoqué la colère de démons qui hantent l’endroit. En remettant en marche le magnétophone, une formule rappelant les démons est prononcée à voix haute. La chose monstrueuse qui vient de se réveiller dans les bois va transformer le séjour en véritable cauchemar. Les arbres, soudain animés d’une vie propre, violent Cheryl, mutilent Scott, et tous deux se muent bientôt en morts-vivants, tout comme Linda et Shelley. Seul survivant, Ash devra farouchement lutter contre ses anciens amis transformés en monstres hideux et hystériques…

On dit que tout le talent d’un auteur transparaît déjà à travers sa première œuvre, fut-ce un petit film d’horreur tourné avec une équipe de jeunes amateurs, du matériel 16 mm et un budget étriqué. Evil Dead confirme l’assertion, tant le résultat, étonnamment maîtrisé, recèle déjà en substance le génie de Sam Raimi et la quintessence de ses travaux futurs. Recyclant un thème d’une banalité pourtant effarante, Evil Dead se détourne bien vite des mécanismes d’un Vendredi 13 auquel son prologue peut faire penser pour faire monter lentement l’épouvante à coups de chocs visuels surprenants, dont certains semblent s’inspirer de L’Exorciste, jusqu’à une explosion d’horreur où les scènes les plus éprouvantes ne sont pas épargnées au spectateur. Le décor réel extrêmement sobre, les acteurs débutants au jeu très effacé, le grain de l’image, tout concourt à faire d’Evil Dead un film au climat très anxiogène.

L'opéra de la terreur

Mais c’est surtout la manière révolutionnaire qu’adopte Sam Raimi pour filmer son histoire qui restera dans les mémoires : travellings vertigineux accompagnés de rugissements indéterminés pour montrer la vision subjective du démon, panoramiques étonnants conçus en boucles fermées, très gros plans, angles de prise de vue des plus inattendus, jeux constants sur les effets sonores (la voiture qui avance silencieusement au milieu des arbres qui craquent, la balançoire qui frappe la porte de la cabane dans un vacarme assourdissant)… Tout ce déploiement de techniques insolites, déjà expérimenté dans le court-métrage Within the Woods qui servit de brouillon du film, sera utilisé comme leitmotiv dans l’œuvre ultérieure de Raimi. Notons qu’Ethan Coen, futur réalisateur de talent (Sang pour sang, Fargo, Le Grand saut), fit lui aussi ses premières armes sur Evil DeadEvil Dead fera sensation en 1982 au marché du film de Cannes et au Festival du Film Fantastique de Paris, puis deviendra un hit des vidéoclubs, alors en pleine expansion. Porté par le succès inattendu de son film, Sam Raimi en réalisera deux séquelles officielles, exploitant le caractère comique de l’intrigue sans se priver d’horreur graphique et d’outrances visuelles.

 

© Gilles Penso

 

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