LE LOUP DES MALVENEUR (1943)

Dans l’ombre des « Universal Monsters » des années 30/40, le Français Guillaume Radot met en scène une malédiction familiale ancestrale…

LE LOUP DES MALVENEUR

 

1943 – FRANCE

 

Réalisé par Guillaume Radot

 

Avec Madeleine Sologne, Pierre Renoir, Gabrielle Dorziat, Marcelle Géniat, Louis Salon, Michel Marsay, Yves Furet

 

THEMA LOUPS-GAROUS

Le Loup des Malveneur est le premier film de Guillaume Radot, un artisan modeste du cinéma français qui réalisa six autres longs-métrages jusqu’en 1957. Une vieille légende concerne la famille des Malveneur dont un lointain aïeul était supposé se transformer nuitamment en loup. La devise familiale est d’ailleurs « Avec eux, je hurle », ce qui en dit long. Or cette famille semble subir encore de nos jours la malédiction, étant donné que la plupart de ses membres périssent de manière violente. Le dernier des Malveneur, Reginald (Pierre Renoir), n’est pas un être franchement recommandable. Il tue en effet sans le moindre état d’âme plusieurs domestiques (qu’il considère quasiment comme des êtres inférieurs) pour effectuer secrètement des expériences sur le rajeunissement des cellules vivantes, sous les yeux épouvantés de son épouse moribonde Estelle (Marie Olinska). Sa sœur Magda (Gabrielle Dorziat), semble liée à lui par une relation étrange, à la limite de l’inceste, et sa première rencontre avec la jeune gouvernante Monique Valory (Madeleine Sologne) est l’un des moments forts du film, proche de l’atmosphère trouble du Rebecca d’Alfred Hitchcock. Monique est chargée d’éduquer Geneviève, la fillette de cinq ans de Reginald. Mais intriguée par l’étrangeté de la situation, elle décide de mener sa petite enquête, aidée par le peintre en villégiature Philippe (Michel Marsay) avec lequel elle va nouer une idylle…

Ce film curieux, sur lequel semble planer l’ombre des « monster movies » du studio Universal, brasse des thèmes et des sujets d’inspirations diverses : une malédiction très proche de celle du “Chien des Baskerville” (le titre semble d’ailleurs s’y référer), la lycanthropie, le savant fou, le mystère policier, le château hanté… Hélas, le résultat suscite un ennui profond, pas vraiment à cause du mauvais agencement de ses multiples références, mais plutôt du fait de la désinvolture du film lui-même. Les personnages, interprétés par de bien fades comédiens, sont terriblement transparents, l’intrigue manque singulièrement de clarté (comme si le montage avait omis des scènes significatives), et l’angoisse mêlée de suspense qu’aurait dû dégager cette histoire de morts et de disparitions dans un château maudit voit son potentiel anéanti par une légèreté de ton assez malvenue.

Un faux classique

La direction artistique elle-même manque singulièrement de caractère et de recherche esthétique (malgré un générique prometteur dont le titrage est calqué sur celui des Frankenstein des années 30), et le loup-garou dont il est question dès les prémices ne pointe jamais vraiment le bout de son museau velu. Le spectateur n’aura donc pas la moindre métamorphose à se mettre sur la dent. C’est d’autant plus dommage que le scénario de Francis Vincent-Bréchignac portait en son sein toutes les composantes possibles d’un passionnant film d’horreur doublé d’une satire sociale s’attaquant aux arrogances de l’aristocratie. Faute d’effets spéciaux dignes de ce nom, Guillaume Radot aurait pu s’appuyer sur des effets de suggestion hérités de Jacques Tourneur (La Féline, Vaudou, L’Homme léopard), mais même cette approche est écartée. Le Loup des Malveneur reste donc une œuvre très mineure, malgré ses allures de classique.

 

© Gilles Penso


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