LE TÉMOIN DU MAL (1998)

Denzel Washington incarne un policier enquêtant sur une entité maléfique capable de voyager de corps en corps…

FALLEN

 

1998 – USA

 

Réalisé par Gregory Hoblit

 

Avec Denzel Washington, John Goodman, Donald Sutherland, Embeth Davidtz, James Gandolfini, Elias Koteas

 

THEMA DIABLE ET DÉMONS

Le film policier et le fantastique ne sont pas des genres faciles à mixer, dans la mesure où l’un repose sur des bases hyperréalistes et l’autre sur l’imagination la plus débridée. C’est pourtant cet audacieux mélange que tente ici le réalisateur Gregory Hoblit, peu familier avec l’épouvante mais à l’aise dans l’univers de la police puisqu’on lui doit les premiers épisodes des séries Hill Street Blues, La Loi de Los Angeles, Flic à tout faire et New York Police Blues, ainsi que Peur primale sur le grand écran. « Mon père était agent du F.B.I. et j’ai donc grandi dans ce milieu », nous raconte Hoblit. « À mon avis les histoires policières sont d’une incomparable richesse en matière de personnages forts et de situations critiques » (1). Longtemps pressenti pour tenir le rôle principal du Témoin du mal, Arnold Schwarzenegger cède finalement le pas à Denzel Washington qui, reconnaissons-le, est bien plus crédible que ne l’aurait été l’ex-Terminator dans la peau d’un flic banal. Pour lui donner la réplique, Hoblit opte pour de solides comédiens de la trempe de Donald Sutherland, John Goodman, James Gandolfini et Elias Koteas, sans oublier Embeth Davidtz, inoubliable dans L’Armée des ténèbres et La Liste de Schindler.

Pour donner corps au Témoin du mal, le réalisateur s’appuie sur deux modèles du genre qui resteront sans doute à jamais insurpassés : Rosemary’s Baby et L’Exorciste. Ce qui l’intéresse, dans les classiques de Polanski et Friedkin, est leur capacité à faire surgir le diable dans un contexte familier et concret. Le scénario du Témoin du mal, écrit pat Nicholas Kazan (Le Mystère Von Bulow), prend donc pour héros un inspecteur de la brigade criminelle de Philadelphie, John Hobbes (Washington). Celui-ci affronte bien malgré lui une entité maléfique portant le nom d’Azazel et voyageant de corps en corps depuis que le tueur en série Edgar Reese (Elias Koteas) lui a lancé une malédiction avant son exécution. Alors que le criminel périt dans la chambre à gaz, la caméra s’élève, traverse le plafond, passe d’une pièce à l’autre (par l’entremise d’images de synthèse habiles) et annonce aux spectateurs que le Mal est désormais en liberté, prêt à se déployer partout…

Le diable aux corps

Ce sujet pour le moins original pousse Hoblit à opter pour d’intéressants choix de mise en scène. « Je souhaitais modifier la palette des couleurs au fur et à mesure du déroulement de l’histoire », nous explique-t-il. « Au début, nous avons utilisé des teintes très chaudes, des rouges, des oranges, des dorés. Puis, progressivement, nous avons employé des couleurs plus froides et plus ternes, jusqu’à tendre vers le monochromatique à la toute fin » (2). Difficile de ne pas penser à Hidden lorsqu’Azazel passe d’un hôte humain à l’autre, conditionnant leur comportement en les muant en simples marionnettes assujetties à sa volonté. La séquence la plus étonnante, en ce domaine, est celle où tous les passants d’une rue sont contaminés l’un après l’autre à toute vitesse (une scène savamment chorégraphiée par Russell Clark dans laquelle les « possédés » sont incarnés par des danseurs). Malgré une première partie pleine de promesses, Le Témoin du mal peine hélas à passionner ses spectateurs jusqu’au bout, empruntant finalement des voies connues sans parvenir à réinventer le genre. Malgré le savoir-faire de Gregory Hoblit et le charisme impeccable de Denzel Washington, les spectateurs ne répondront guère présent et le film sombrera progressivement dans l’oubli.

 

(1) et (2) Propos recueillis par votre serviteur en février 1998

 

© Gilles Penso


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