L’ARMÉE DES TÉNÈBRES (1992)

Le troisième épisode de la saga Evil Dead oublie le huis-clos oppressant au profit d'une épopée d'heroic fantasy délirante

ARMY OF DARKNESS

1992 – USA

Réalisé par Sam Raimi

Avec Bruce Campbell, Embeth Davidtz, Marcus Gilbert, Ian Abercrombie, Richard Grove, Bridget Fonda

THEMA ZOMBIES I DIABLES ET DEMONS I VOYAGES DANS LE TEMPS SAGA EVIL DEAD

Après un Evil Dead très sombre et un Evil Dead 2 oscillant entre l’horreur sordide et le burlesque cartoonesque, Sam Raimi et son producteur Robert Tapert se lancent dans une Armée des ténèbres complètement exempte de gore, laissant place à une épopée fantastique et médiévale à grand spectacle, ponctuée d’humour nonsensique. Ici, les influences ne sont donc plus L’ExorcisteLa Nuit des Morts-Vivants et H.P. Lovecraft, mais plutôt Jason et les Argonautes, les dessins de Frank Frazetta et les récits d’héroïc-fantasy. Une tronçonneuse greffée au poignet, un fusil à canon scié dans l’autre main, Ash (Bruce Campbell) remonte le cours du temps jusqu’à l’an 1300 face au roi Arthur. Poursuivi par des forces diaboliques, il doit retrouver le Necronomicon, ce fameux grimoire qui pourra le renvoyer à son époque. Mais par maladresse, il réveille une armée de cadavres, dirigée par Evil Ash qui n’est autre que son double maléfique. Armés de pied en cap, et se ralliant de nouveaux membres à chacune de leurs victimes, les morts assiègent le château d’Arthur.

Désireux de rendre hommage à Ray Harryhausen, Sam Raimi ponctue son film d’un bestiaire référentiel. Le premier est une harpie démoniaque arborant quatre bras crispés et des ailes translucides, qui attaque le château d’Arthur et enlève Sheila (Embeth Davidtz). Mais la référence au maître des monstres animés apparaît pleinement dans une séquence surréaliste au cours de laquelle une vingtaine de squelettes émergent dans un cimetière et, armés de pelles, déterrent leurs congénères. Puis vient le combat de Ash contre son double maléfique, réduit à l’état d’un sac d’os zombifié. Hélas, la qualité des effets visuels laisse souvent à désirer. Du coup, certains effets ne fonctionnent guère et ne réussissent jamais à dépasser le mètre étalon Harryhausen qui, il faut bien l’avouer, avait placé la barre très haut. « Ces squelettes ont été réalisés sur la base de jouets Mattel », raconte l’animateur Peter Kleinow. « Nous leur avons ajouté des rotules pour les articulations. Il y avait de nombreux plans complexes, notamment lorsque l’armée des squelettes avance vers le château, et que quatre d’entre eux transportent un bélier. Je ne suis pas entièrement satisfait du résultat, mais nous ne pouvions pas nous permettre de refaire les prises. » (1) Fort heureusement, les maladresses de certains de ces trucages optiques sont rattrapées par leur inventivité et leur grain de folie, notamment dans la séquence où Ash est attaqué par des clones miniatures de lui-même.

« Klaatu Barada Nikto »

L’humour, devenu omniprésent, est ici plus ou moins efficace. Si le recyclage de la formule « Klaatu Barada Nikto », issue du Jour où la Terre s’arrêta, fait mouche auprès des cinéphiles, on ne peut pas en dire autant des grimaces de Evil Ash, ou de l’épilogue ruinant par sa légèreté l’ampleur de l’aventure. Il faut dire aussi que ce troisième Evil Dead a souffert de sa sortie tardive, suite à de stupides démêlés juridiques, arrivant ainsi après le Robin des Bois de Kevin Reynolds (celui-ci s’étant indiscutablement inspiré de Sam Raimi pour filmer ses flèches) et Les Visiteurs de Poiré, dont il annonçait les thèmes et certaines situations. Jo Lo Duca, fidèle à la saga Evil Dead depuis le début, poursuit la veine symphonique amorcée avec l’opus 2. Il n’hésite pas ici à souligner les cavalcades d’envolées très lyriques, chœurs à l’appui, et se laisse aller avec bonheur aux mélodies médiévales. Danny Elfman lui-même, auteur de la BO de Darkman, signe un morceau, celui de la «marche des morts», qui évoque le thème du Pingouin de Batman le défi.

(1) Propos recueillis par votre serviteur en mars 1999

 

© Gilles Penso

 

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