SOUVENIRS DE L’AU-DELÀ (1995)

Jeff Goldblum revient d’entre les morts et affronte un adorateur de Satan dans ce gloubi-boulga sans queue ni tête dirigé par le réalisateur du Cobaye

HIDEAWAY

 

1995 – USA / CANADA

 

Réalisé par Brett Leonard

 

Avec Jeff Goldblum, Christine Lahti, Alicia Silverstone, Jeremy Sisto, Alfred Molina, Rae Dawn Chong, Kenneth Welsh

 

THEMA MORT

Souvenirs de l’au-delà avait tout pour plaire. Un roman passionnant de Dean Koontz comme source d’inspiration, un casting très séduisant (Jeff Goldblum, Alicia Silverstone, Jeremy Sisto, Alfred Molina, Rae Dawn Chong), un réalisateur à la popularité croissante (grâce au petit événement créé par Le Cobaye)… Bref, tout semblait bien parti. Alors comment expliquer le désastre financier et artistique du film ? Visiblement à cause d’une série de décisions malheureuses ayant progressivement transformé le projet prometteur en gâchis spectaculaire. Au départ, Koontz travaille en étroite collaboration avec Mike Medavoy, alors président de TriStar Pictures, qui supervisa entre autres les productions de Philadelphia, Terminator 2, Cliffhanger ou The Fisher King. Après avoir lu une première version du script, celui-ci demande une révision pour mieux coller à la vision première de l’écrivain. Mais suite à une mésentente avec Peter Gruber, le patron de Sony Pictures, Medavoy jette l’éponge pour s’en aller créer Phoenix Pictures. Souvenirs de l’au-delà se retrouve alors entre les mains d’une toute nouvelle équipe de production qui ne sait trop quoi en faire et le dénature radicalement. Particulièrement déçu par le sort réservé à son « bébé », Dean Koontz demande aussitôt de faire retirer son nom du générique et de tout le matériel publicitaire du film, une requête qui ne sera pas satisfaite à 100%.

De quoi parle donc Souvenirs de l’au-delà ? L’entame nous fait découvrir un dangereux psychopathe qui tue sa mère et sa sœur, aménage leurs cadavres selon un rituel satanique, récite une prière à l’attention du seigneur des ténèbres puis se suicide. Cliniquement mort, notre adorateur du diable voit une série de tunnels de lumière et se retrouve précipité aux Enfers. Ça commence donc assez fort ! Nous voilà ensuite en présence de Hatch Harrison (Jeff Goldblum), victime d’un accident de voiture spectaculaire duquel s’échappent par miracle sa femme Lindsey (Christine Lahti) et sa fille Regina (Alicia Silverstone). Alors qu’il se retrouve entre la vie et la mort sur une table d’opération, Hatch a d’étranges visions : des tunnels de lumière (les mêmes que ceux du tueur), puis un décor paradisiaque où lui apparaît une jeune fille, Samantha (Tiffany Foster), morte plusieurs années plus tôt dans un accident de voiture. Lorsque Hatch est ranimé par le docteur Jonas Nyebern (Alfred Molina), il ne revient pas indemne de ce voyage dans l’au-delà…

Entre ciel et terre

Comme on pouvait le craindre, le potentiel extraordinaire du livre de Dean Kontz est anéanti par une succession de partis pris narratifs et esthétiques très douteux, fruits d’une production chaotique. Le concept premier, qui n’est pas sans évoquer L’Expérience interdite (ceux qui reviennent d’entre les morts ne reviennent pas seuls) et Les Yeux de Laura Mars (le héros voit à travers les yeux d’un assassin qui se rapproche de lui), est pourtant passionnant. Les meilleurs passages du film tirent parti de cette vision transférée, en particulier au cours d’une scène de suspense nocturne où l’assassin séduit Regina. Mais la mise en scène de Brett Leonard – visiblement dépassé par les événements – est peu inspirée, sa direction d’acteurs inexistante (Goldblum a rarement été si peu expressif) et la construction de la narration totalement évasive. Les spectateurs auront beaucoup de mal à croire à cette possibilité miraculeuse de ramener les morts à la vie, alors que les protagonistes, eux, ne s’en étonnent pas le moins du monde. Cela dit, la plus grosse erreur du film est sans doute son imagerie extrêmement naïve nous offrant une vision de l’au-delà caricaturalement manichéenne (âmes damnées squelettiques, rouges et fumantes chez les méchants, silhouettes angéliques, diaphanes et nimbées de bleu chez les gentils), le tout ponctué d’images de synthèse grossières qui font sombrer dans le ridicule l’affrontement final entre l’Enfer et le Paradis.

 

© Gilles Penso


Partagez cet article