RENCONTRE AVEC LE DRAGON (2003)

Un jeune écuyer se met au service d’un chevalier campé par Daniel Auteuil dont la légende dit qu’il aurait survécu au souffle d’un dragon…

RENCONTRE AVEC LE DRAGON

 

2003 – FRANCE

 

Réalisé par Hélène Angel

 

Avec Daniel Auteuil, Nicolas Nollet, Sergi Lopez, Gilbert Melki, Emmanuelle Devos, Titoff, Maurice Garrel, Claude Perron

 

THEMA SORCELLERIE ET MAGIE I DRAGONS I CONTES

Rencontre avec le dragon porte en lui tous les éléments dramatiques propres au conte de fées, tout en se déroulant dans un univers médiéval extrêmement réaliste, cru et dénué de concession. Et c’est là que réside toute l’étrangeté de l’œuvre d’Hélène Angel, ancienne élève de la prestigieuse Fémis ayant fait ses dents sur une série de courts-métrages au début des années 1990 avant d’écrire le scénario de Superlove pour Jean-Claude Janer puis d’attaquer elle-même son premier long, le curieux Peau d’homme cœur de bête avec Serge Riaboukine. Titré Dragon Knight ou The Red Knight sur le marché international au fil de ses diverses exploitations, Rencontre avec le dragon s’appuie sur un scénario co-écrit par la réalisatrice, Jean-Claude Janer et Agnès de Sacy. Le récit tourne autour de la légende de Guillaume de Montauban (Daniel Auteuil), un homme qui aurait survécu au souffle enflammé d’un dragon et en aurait tiré l’invincibilité. Le jeune Félix de Sisteron (Nicolas Nollet) voue une admiration sans borne à ce « héros » surnommé depuis Dragon Rouge, et lorsqu’il le rencontre enfin, il lui propose ses services en tant qu’écuyer. Mais Guillaume s’avère être un homme aigri, brutal, arrondissant ses fins de mois en jouant les mercenaires. Et lorsque son passé se révèle chargé de trahisons et de meurtres, Félix commence sérieusement à douter de l’intégrité de son idole…

Malgré le titre et la légende, aucun dragon ne montre le bout de son museau dans le film. Pourtant, le fantastique se love très tôt au cœur du récit, et éclate au sein d’une incroyable séquence où Raoul de Vautadour (Sergi Lopez), ancien ami de Guillaume ayant basculé dans la folie, se transforme littéralement en sanglier. La scène se passe d’effets spéciaux, misant son impact sur le jeu halluciné de Lopez et une bande son très suggestive. Ainsi, à l’instar des infortunés protagonistes du Ladyhawke de Richard Donner, Raoul est victime d’une malédiction qui le mue chaque nuit en animal, et ce depuis qu’il a découvert que sa femme Isabelle avait été assassinée par Guillaume. Un crime passionnel qui, depuis, hante le Dragon Rouge déchu. Plus tard dans le film, c’est carrément le fantôme d’Isabelle qui erre dans les bois, apparaissant aux héros sous forme d’une géante livide et ensanglantée qui se déplace en glissant sans bruit…

Le mélange des genres

Tous ces éléments de pure féerie s’accommodent à vrai dire difficilement au réalisme du moyen âge décrit par Hélène Angel, et ce mélange des genres s’avère finalement hasardeux. La lenteur du film joue également en sa défaveur, tout comme la majeure partie de ses comédiens qui semblent ne pas trop croire à leurs personnages, malgré un casting des plus audacieux. « C’est un OVNI qui a coûté cher », avouera la réalisatrice quelques années plus tard. « Les producteurs de l’époque voulaient une affiche grand public. Il y avait une dichotomie entre ce que les gens pensaient voir et le résultat final. Mais j’ai retenu une leçon : quand on fait un cinéma singulier, il ne faut pas que ça coûte trop cher. Peut-être que j’ai fait Rencontre avec le dragon trop tôt » (1). Reste Daniel Auteuil. Impérial, taciturne, charismatique en diable, le comédien excelle dans un registre qu’on ne lui connaissait pas, et il demeure la véritable illumination de cette œuvre décidément trop chaotique pour convaincre.

 

(1) Extrait d’un entretien paru sur le site « Chaos Reign » en juin 2020.

 

© Gilles Penso


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