Une communauté de militants anticapitalistes, installée en pleine nature, découvre qu’une catastrophe vient d’anéantir l’humanité…
PROBLEMOS
2017 – FRANCE
Réalisé par Eric Judor
Avec Eric Judor, Blanche Gardin, Youssef Hajdi, Michel Nabokoff, Claire Chust, Bun Hay Mean, Dorothée Pousséo, Marc Fraize, Arnaud Henriet, Eddy Leduc
THEMA CATASTROPHES
Après le revers commercial de La Tour 2 contrôle infernale, boudé par le public et la critique contrairement au premier opus qu’avait mis en scène Charles Nemes, Éric Judor décide de revoir ses ambitions à la baisse, sans oublier ses penchants pour l’absurdité à grande échelle et les concepts insolites (déjà très visibles dans son premier long-métrage, Seuls Two). Sans son complice Ramzy, il se lance dans Problemos. Derrière ce titre bizarre (qui sonne un peu comme le Calmos de Bertrand Blier) se cache une satire sociale acerbe sur fond de fable post-apocalyptique tournée dans des décors naturels ardéchois avec une troupe de comédiens déchaînés dont Judor prend naturellement la tête. Co-écrit par Noé Debré et Blanche Gardin (peu connue encore du grand public malgré ses premiers spectacles et sa prestation dans la mini-série Working Girls), le scénario de Problemos s’appuie sur une actualité bien réelle : la lutte des communautés militantes installées dans les ZAD (Zone à Défendre) face aux autorités qui cherchent à les déloger pour entreprendre leurs projets industriels. C’est notamment le mouvement activiste « Nuit Debout » qui sert d’inspiration à Debré et Gardin. En mêlant cette idée avec celle d’un effondrement de l’humanité (la série The Walking Dead bat alors son plein sur les petits écrans du monde entier), Éric Judor tient le sujet de son troisième film.
Problemos s’intéresse à Jeanne (Celia Rosich) et Victor (Eric Judor), deux parisiens qui prolongent leurs vacances avec leur fille Margaux (Marie Helmer) pour rendre visite à leur ami Jean-Paul (Michel Nabokoff). Ce dernier vit dans une communauté de babas cools située dans une ZAD, militant contre la construction d’un parc aquatique. Séduite par le mode de vie alternatif de cette communauté anticapitaliste qui prône un retour à la nature, loin de la technologie et de la société industrielle, Jeanne décide de rester quelques jours, même si Victor se montre beaucoup moins enthousiaste. Un matin, nos activistes exaltés découvrent que les CRS qui surveillaient la zone ont disparu… comme le reste de la population. Une pandémie dévastatrice semble en effet avoir éradiqué la quasi-totalité de l’humanité. Seraient-ils les seuls survivants de la planète ? Vont-ils pouvoir porter la lourde responsabilité de rebâtir le monde selon leurs convictions idéalistes ?
Babas pas cool
Féministes, écologistes, hippies, végans, pacifistes… Tout le monde en prend pour son grade dans Problemos. Cette société utopique fondée sur des principes égalitaires verse volontiers dans la caricature, notamment par la voix de Blanche Gardin qui incarne la plus extrémiste de ces gardiens de la bonne parole. Auto-baptisé Gaïa, son personnage refuse de donner un prénom ou un genre à son enfant pour le laisser choisir lui-même et entonne à la guitare des odes à la menstruation ! Et lorsque le monde s’écroule, les bons sentiments et le « vivre ensemble » volent gentiment en éclat tandis que les vieux instincts de propriété, d’égoïsme, de sectarisme et de hiérarchie ressortent du bois. De ce côté-là, la satire fait mouche, d’autant que l’autre facette sociale (le parisien conformiste et arrogant que campe Judor) n’est pas non plus épargnée. Les dialogues sont bien sentis, les acteurs au top de leur forme, mais l’on peut regretter que le sarcasme finisse par tourner un peu en rond tandis que la situation piétine. De fait, Problemos ne nous semble pas tirer pleinement parti de son postulat prometteur, comme en témoigne ce final en queue de poisson qui refuse volontairement de faire prendre au film une autre dimension. Rétrospectivement, on s’étonnera non sans trouble du côté prophétique du scénario de Problemos, qui anticipait de trois ans sur la pandémie bien réelle du Covid-19.
© Gilles Penso
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