

Sandra Bullock interprète une femme perturbée par des rêves de plus en plus envahissants au cours desquels son époux meurt… puis renaît !
PREMONITION
2007 – USA
Réalisé par Mennan Yapo
Avec Sandra Bullock, Julian McMahon, Shyann McClure, Courtney Taylor Burness, Nia Long, Marc Macaulay, Kate Nelligan, Irene Ziegler, Philip DeVona
THEMA RÊVES
Prémonitions marque les débuts hollywoodiens de Mennan Yapo, un réalisateur germano-turc jusqu’alors méconnu du grand public. Après quelques courts-métrages et le thriller Soundless (2004) remarqué en Allemagne, Yapo attire l’attention des studios américains grâce à sa capacité à insuffler une tension sourde et une esthétique soignée à ses récits. C’est précisément ce que recherche le scénariste Bill Kelly, connu pour la comédie romantique Première sortie (1999), désireux ici de creuser un registre plus sombre et métaphysique. Le projet prend forme sous la houlette des producteurs de Hyde Park Entertainment, qui souhaitent surfer sur le succès de thrillers psychologiques comme Les Autres ou Sixième sens. Le rôle principal est confié à Sandra Bullock, alors en pleine reconquête critique après des années de comédies romantiques. Forte du succès de Collision (Oscar du meilleur film en 2006), l’actrice veut démontrer l’étendue de sa palette dramatique. Elle incarne ici une femme prise dans une boucle temporelle angoissante. À ses côtés, Julian McMahon, surtout connu pour son rôle dans la série Nip/Tuck, campe son époux. L’alchimie fonctionne d’autant plus que le film repose entièrement sur la confusion psychologique de l’héroïne.


Linda Hanson a tout pour être heureuse : un mari aimant, deux filles adorables, une maison de rêve… Mais un jour, tout s’effondre : Linda est avertie que son mari, Jim, est mort dans un accident de la circulation. Le lendemain matin, à son réveil, Linda constate que Jim est bien vivant. Ce n’était donc qu’un banal cauchemar… Mais voilà que ce mauvais rêve, loin de se dissiper, revient la hanter, jour après jour, sans cesse changeant, et toujours plus perturbant. Certains matins, Linda se retrouve veuve ; d’autres fois, c’est aux côtés d’un Jim en pleine forme qu’elle s’éveille. Quel sens donner à ces prémonitions ? Privée de ses repères habituels, ballottée entre des émotions contradictoires, et craignant de sombrer dans la folie, Linda résiste de toutes ses forces à une tragédie imminente. Un seul but désormais : arrêter la ronde infernale du temps pour tenter de sauver son mariage, son bonheur, son avenir…
Cauchemars en boucle
Au départ, Prémonitions ressemble donc à un mauvais rêve. Mais ce rêve se répète, se transforme, ajoute des inconnues, des faits étranges. Et au réveil, certains détails prennent un sens troublant. S’agit-il d’un enchaînement de cauchemars, de deux réalités parallèles alternatives, ou de visions prémonitoires comme semble l’indiquer le titre du film ? La mise en scène de Mennan Yapo est raffinée, tout en sobriété. Le cinéaste évite en effet les effets faciles pour installer une angoisse diffuse et constante. Cette atmosphère instable entre pleinement en résonance avec la prestation de Sandra Bullock, qui prouve une fois encore combien elle peut exceller dans le registre dramatique. Autour d’elle, les seconds rôles restent en retrait mais justes. La musique de Klaus Badelt sait éviter la trop forte influence de Hans Zimmer pour accompagner en finesse la montée en tension. Au-delà de sa structure fragmentée et de son ambiguïté temporelle, Prémonitions interroge aussi la foi et le libre arbitre. « Les gens qui ne croient en rien sont comme des vaisseaux vides, ils risquent davantage de se retrouver soumis à des forces qui les dépassent », dit ainsi à Linda le prêtre qu’elle rencontre en désespoir de cause, la visite chez le psychiatre n’ayant rien donné de concluant. Si le film culmine vers un excellent suspense final, il trébuche sur un épilogue en queue de poisson qui affaiblit son impact. Dommage. Reste une œuvre troublante, élégante, qui ose parler de deuil, de destin et de salut sans sombrer dans le mélodrame.
© Gilles Penso
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