MOI, MOCHE ET MÉCHANT (2010)

Pour ses premiers au cinéma, le studio français Illumination inaugure les aventures d’un super-vilain exubérant et de ses incontrôlables Minions…

DESPICABLE ME

 

2010 – USA / FRANCE

 

Réalisé par Pierre Coffin et Chris Renaud

 

Avec les voix de Steve Carell, Jason Segel, Russell Brand, Julie Andrews, Will Arnett, Kristen Wiig, Miranda Cosgrove, Dana Gaier, Elsie Fisher, Pierre Coffin

 

THEMA SUPER-VILAINS

En 2010, alors que le cinéma d’animation est déjà dominé par les mastodontes Pixar et DreamWorks, un petit studio venu de nulle part, Illumination Entertainment, s’invite à la fête avec Moi, moche et méchant. À la barre, deux réalisateurs français, Pierre Coffin et Chris Renaud, s’appuyant sur le savoir-faire de la compagnie d’effets visuels Mac Guff, qui s’était déjà prêtée à l’exercice en 2008 avec le long-métrage Chasseurs de dragons. Cette fois-ci, le projet, basé sur une idée de l’animateur espagnol Sergio Pablos, est chapeauté par Universal, via le producteur Chris Meledandri (Titan A.E., L’Âge de glace, Les Simpsons : le film). Le pitch de Moi, moche et méchant est joyeusement délirant : Gru, super-vilain vieillissant à l’accent improbable, rêve de redevenir le plus grand criminel de tous les temps (Steve Carell en VO, Gad Elmaleh en VF). Son plan consiste à voler la Lune, rien que ça ! Mais son ego de criminel en quête de gloire se heurte à un concurrent plus jeune et plus branché, Vector, geek arrogant et fan de gadgets inutiles. Pour parvenir à ses fins, Gru adopte trois orphelines aussi mignonnes que rusées. Et c’est là que tout bascule. Car derrière la façade grincheuse du vilain au nez crochu se cache un cœur prêt à fondre.

Pas si manichéen qu’il n’en a l’air, Moi, moche et méchant s’amuse à complexifier un peu ses personnages. Gru n’est pas un méchant ordinaire mais un homme marqué par une enfance difficile, élevé par une mère tyrannique (doublée par Julie Andrews en VO), et dont les ambitions de grandeur masquent un profond vide affectif. Sa transformation progressive, nourrie par les bêtises craquantes des petites Margo, Edith et Agnes, donne au film une densité inattendue. Visuellement, le film mise sur une esthétique très stylisée. Les décors, pleins d’angles biscornus et de couleurs contrastées, rappellent parfois les univers de Tex Avery. L’animation, quant à elle, impressionne par sa fluidité et sa vivacité, malgré un budget modeste comparé aux ténors du secteur. Quant aux Minions, ces petits êtres jaunes à mi-chemin entre les aliens à trois yeux de Toy Story et les Gremlins, ils volent régulièrement la vedette aux héros. Leur langage abscons, leur goût pour le chaos et leur bouille hilarante font mouche à chaque apparition.

Pas si méchant…

Certes, le scénario n’évite pas certains raccourcis. Le méchant Vector est plus caricatural que réellement menaçant, et les rebondissements sont parfois téléphonés. Mais l’ensemble fonctionne grâce à un rythme effréné, un sens du timing comique irréprochable et une certaine tendresse pour ses personnages. Le succès critique et public du film est fulgurant : plus de 500 millions de dollars de recettes mondiales, une pluie de produits dérivés et, bien sûr, une ribambelle de suites et spin-offs centrés sur les Minions. Si certaines de ces extensions de franchise peinent à retrouver la magie du premier opus, celui-ci aura réussi à marquer les mémoires, tant pour son inventivité que pour sa capacité à réconcilier les contraires : le bien et le mal, mais aussi l’humour potache et une certaine sensibilité. Avec Moi, moche et méchant, le paysage de l’animation numérique accueille donc un nouveau joueur, qui n’a peut-être pas la profondeur émotionnelle d’un Là-haut ou la virtuosité technique d’un Dragons, mais qui compense largement par son irrévérence, son énergie contagieuse et son regard plein d’affection sur les monstres que nous portons tous en nous.

 

© Gilles Penso

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