LES GEÔLES DU DIABLE (2008)

Une jeune mère, emprisonnée à cause d’un braquage, se voit confier par sa fille des poupées minuscules aux pouvoirs inattendus…

DANGEROUS WORRY DOLLS

 

2008 – USA

 

Réalisé par Charles Band

 

Avec Jessica Morris, Deb Snyder, Anthony Dilio, Meredith McClain, Cheri Themer, Susan Ortiz, Ker’in Hayden, Renata Green-Gaber, Paul Boukadakis, Rebekah Crane

 

THEMA JOUETS I SAGA CHARLES BAND

Le producteur/réalisateur Charles Band attaque l’année 2008 avec un long-métrage éloigné de ses habitudes, puisqu’il s’agit à priori de l’archétype du « film de prisons de femmes », plus proche des obsessions d’un Jess Franco que des productions Full Moon. Band se lance pourtant sur ce terrain inédit, en s’appuyant sur un scénario d’August White qui coche à priori toutes les cases : bagarres entre détenues, gardiens sadiques, scènes de douches… Mais chassez le naturel et il revient au galop. Le cinéaste ne peut s’empêcher d’intégrer dans le film un motif qui est devenu sa marque de fabrique, autrement dit des petites poupées monstrueuses. Ce cocktail surprenant, à priori antithétique, donne un résultat singulier mais bizarrement cohérent, auquel Band, son directeur de la photographie Terrance Ryker, son créateur d’effets spéciaux Christopher Bergschneider et son casting (Jessica Morris en tête) apportent un maximum de soin. Le thème principal de Richard Band, s’il est composé de manière minimaliste (avec des sons synthétiques basiques et une mélodie répétitive), contient encore quelques beaux restes hérités de ses travaux les plus célèbres, autrement dit les bandes originales de Re-Animator et Puppet Master.

L’entrée en matière des Geôles du diable est inhabituellement brutale et réaliste, loin des canons habituels des films Full Moon. Trois détenues en molestent une quatrième dans la cuisine d’une prison, menaçant de lui broyer la main si elle refuse de transporter de la drogue pour elles. Mais la « victime », Eva (Jessica Morris), n’entend pas se laisser faire, ni céder aux avances de Carl (Anthony Dilio), l’un des gardiens libidineux de cette prison pour femmes, ou aux menaces de la directrice de l’établissement, Madame Ivar (Deb Snyder), adepte de la torture punitive. Mère d’une fillette, Eva a multiplié les mauvais choix jusqu’à finir entre ces quatre murs. Mais sa peine de six mois risque de se prolonger si les ennuis continuent à lui tourner autour. Un jour, alors qu’elle lui rend visite avec sa tante, sa fille lui offre cinq poupées minuscules. Chacune fait la taille d’un doigt. « Ce sont les poupées anti-soucis », lui dit-elle. « Elles sont supposées faire disparaître les problèmes ».

Les poupées anti-soucis

Le moment de bascule du film, autant singulier dans l’idée qui le sous-tend que dans sa mise en œuvre, voit l’une des poupées minuscules entrer en pleine nuit dans l’oreille d’Eva, pénétrer dans son cerveau et ressortir par une boursouflure de son front en ricanant ! « Cet effet a été inspiré par celui utilisé dans Star Trek II avec l’oreille de Chekhov », explique Christopher Bergschneider. « Notre oreille en silicone mesurait environ 45 cm de haut. J’ai fabriqué une marionnette à tiges représentant la petite poupée et j’ai réalisé plusieurs plans d’insertion avec le très talentueux John Lechago. Nous étions seuls tous les deux sur le plateau, car Band savait déjà que nous savions ce qu’il fallait faire. Et John a utilisé les effets numériques pour supprimer les tiges et lisser le plan. » (1) Le résultat à l’écran est remarquablement fluide. D’autant que les gros plans de la petite créature surgissant du front, avec son faciès squelettique et ses yeux lumineux, offre un spectacle joyeusement surréaliste. La transformation physique et psychologique d’Eva s’apparente dès lors à une possession démoniaque, et il faut saluer la prestation de Jessica Morris, dans le rôle de cette détenue maltraitée qui se mue en monstre assoiffé de sang. Malgré ses moyens précaires et ses ambitions somme toute limitées, Les Geôles du diable est donc l’un des opus les plus intéressants qu’ait pu signer Charles Band à l’époque. Il resta pourtant sans suite, malgré la propension de Full Moon à ré-exploiter habituellement ses idées pour en tirer des franchises.

 

(1) Propos extraits du livre « It Came From the Video Aisle ! » (2017)

 

© Gilles Penso

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