LA REVANCHE DE FRANKENSTEIN (1958)

Ce second Frankenstein produit par la Hammer montre une expérience qui réussit enfin… Jusqu'à ce que les circonstances en décident autrement

THE REVENGE OF FRANKENSTEIN

1858 – GB

Réalisé par Terence Fisher

Avec Peter Cushing, Michael Gwynn, Francis Matthews, Oscar Quitak, Eunice Gayson, John Welsh, Lionel Jeffries

THEMA FRANKENSTEIN 

Dans ce second Frankenstein de la Hammer, le monstre, cette fois joué par Michael Gwynn, est constitué des membres amputés de plusieurs malades d’un hospice et du cerveau du bossu Karl. Suivant le modèle de La Fiancée de Frankenstein, cette Revanche de Frankenstein s’avère plus réussie que Frankenstein s’est échappé, tout en s’inscrivant dans le même courant subversif et modernisé. Le scénario de Jimmy Sangster, moins bavard que dans Frankenstein s’est échappé, n’a plus grand-chose à voir avec Mary Shelley et se débarrasse définitivement des derniers oripeaux hérités de la série Universal, tandis que Terence Fisher atteint ici les sommets de son art, dynamisant sa mise en scène et l’agrémentant de passages sanglants flirtant bien souvent avec l’humour noir le plus cynique. Ici, le baron a survécu à l’échafaud en soudoyant le bourreau et en faisant exécuter le prêtre à sa place ! Trois ans plus tard, sous le nom de Victor Stein, il ouvre un cabinet à Carlsbuck. Hans Kleve (Francis Matthews), jeune praticien, le reconnaît et devient son assistant. La froideur du baron dans l’épisode précédent s’est ici muée en délicieuse duplicité, le savant se camouflant derrière ses activités charitables de médecin des pauvres, adoré du peuple mais détesté du conseil médical pour lequel il représente une concurrence irritante. Le film peut donc s’apprécier comme une salve lancée à l’encontre de la bourgeoisie bienséante et hypocrite.

Peter Cushing a affiné son jeu, et il est difficile de ne pas partager son enthousiasme, d’autant que, pour une fois, son expérience réussit parfaitement… la catastrophe étant provoquée après coup par accident. En effet, la créature tente de détruire son ancien corps de bossu camouflé dans le laboratoire. Surprise par le concierge, elle est assommée et son cerveau est lésé. Michael Gwynn campe le plus émouvant et le plus pathétique des « monstres » de la série Hammer. Le voir peu à peu régresser vers les tares de son ancien corps (son bras se paralyse, sa jambe se raidit, son dos se courbe) a quelque chose de très poignant. Et son irruption au stade final de sa dégénérescence dans une réception mondaine, suppliant Frankenstein de l’aider, est un des moments forts du film.

Le savant fusionne avec sa créature

A la fin, à la faveur d’un rebondissement insensé, la fameuse confusion qu’entretient généralement le public entre le docteur et sa créature prend d’un seul coup tout son sens. Refusant d’aborder toutes les questions métaphysiques que cette ultime péripétie soulève immanquablement, Jimmy Sangster et Terence Fisher se contentent d’en exploiter le potentiel dramatique et ironique. L’épilogue nous montre de fait Frankenstein ouvrant un nouveau cabinet à Londres sous le nom de Victor Frank… La série peut donc tranquillement reprendre son cours. N’hésitant pas à en faire des tonnes, les affiches américaines de l’époque clamaient en guise d’avertissement : « n’allez pas voir ce film seul, sinon vous allez rentrer chez vous en courant ! »

 

© Gilles Penso

 

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