MARS ATTACKS ! (1997)

Après l'échec de son très beau Ed Wood, Tim Burton s'arme de cynisme et orchestre un gigantesque jeu de massacre

MARS ATTACKS !

1997 – USA

Réalisé par Tim Burton

Avec Jack Nicholson, Glenn Close, Pierce Brosnan, Natalie Portman, Michael J. Fox, Sarah Jessica Parker, Martin Short 

THEMA EXTRA-TERRESTRES

« Quand j’ai réalisé Mars Attacks !, je ne me sentais pas en phase avec la dynamique de mon pays et avec les grandes décisions du gouvernement », raconte Tim Burton. « Je me sentais moi-même comme un extra-terrestre. D’où mon envie de décrire une lutte entre ce qui semble normal et ce qui ne l’est pas. » (1) Mars Attacks ! s’inspire de cartes illustrées datant de 1962 et décrivant une invasion extraterrestre gore et burlesque. Dès le début du film, des milliers de soucoupes volantes venues de Mars encerclent la Terre. Quelle attitude adopter face à une telle situation ? C’est la question qui tourmente le président des Etats-Unis. Le général Decker prône l’attaque armée et l’extermination, et le professeur Kessler le dialogue et la compréhension. Lorsque les Martiens révèlent leur vraie nature, c’est hélas le premier qui semblait avoir raison. 

Burton est parvenu à réunir un casting de rêve, comme à l’époque des films catastrophe des années 70. En tête d’affiche, Jack Nicholson hérite du double rôle d’un président affable et d’un businessman avisé, deux interprétations conjointes évoquant la triple performance de Peter Sellers dans Docteur Folamour. Cette référence se confirme lors des grandes scènes de débats houleux dans la Salle de Guerre ornée d’une vaste carte du monde. La femme du président a pris les traits de Glenn Close, et sa fille ceux de Natalie Portman. A proximité, en professeur pacifiste et optimiste, Pierce Brosnan nous offre une composition extraordinaire, à mille lieues de James Bond. A leurs côtés, on trouve Michael J. Fox, Sarah Jessica Parker, Annette Bening, Danny de Vito, Martin Short, Pam Grier, Rod Steiger, Tom Jones, bref du beau monde. 

Adieu à la stop-motion

D’un point de vue technique, Tim Burton a opté pour des effets spéciaux ultra-sophistiqués, sans évacuer pour autant le parfum de nostalgie qui lui est cher. Du coup, les vaisseaux martiens sont les copies conformes de ceux des Soucoupes volantes attaquent animés par Ray Harryhausen. « J’ai détruit le Monument de Washington longtemps avant Tim Burton ! » nous confirmait ce dernier en riant (2). Le robot géant qui pourchasse l’un des héros évoque aussi la SF des fifties, et lorsque les soucoupes s’échouent en mer, on croirait visionner le final des Survivants de l’Infini. Les Martiens eux-mêmes sont extraordinairement expressifs, d’autant que c’était la première fois qu’un long-métrage mettait en scène autant de personnages humanoïdes en 3D. Visuellement, Mars Attacks ! est donc une vraie réussite. Mais les personnages n’étant finalement que des pions dans ce gigantesque jeu de massacre, le spectateur a parfois du mal à leur accorder l’intérêt qu’ils sont supposés susciter. L’humour noir de Burton et son sens permanent de la dérision rattrapent souvent les carences de ce scénario-prétexte, mais l’auteur d’Edward aux mains d’argent semble avoir oublié en cours de route la naïveté qui le guidait jusqu’alors, celle-là même qu’il prônait dans Ed Wood. Ici, le cynisme a pris le relais, et Burton ne croit plus à ce qu’il nous raconte. Cette réponse anarchique au premier degré navrant d’Independence Day est certes joussive, mais on ne peut s’empêcher de préférer les films dans lesquels Burton aime ses personnages envers et contre tous.

 

(1) Propos recueillis par votre serviteur en mars 2012

(2) Propos recueillis par votre serviteur en février 2004

 

© Gilles Penso 

Partagez cet article