SMALL SOLDIERS (1998)

Des petits soldats armés jusqu'aux dents et des monstres miniatures en plastique sèment le chaos dans une petite ville américaine

SMALL SOLDIERS

1998 – USA

Réalisé par Joe Dante

Avec David Cross, Jay Mohr, Alexandra Wilson, Denis Leary, Gregory Smith, Dick Miller, Kirsten Dunst, Jacob Smith

THEMA JOUETS

Mélangez Gremlins et Toy Story, et vous aurez une idée assez précise de ce qu’est Small Soldiers, une fable antimilitariste signée par Joe Dante sous la houlette de Steven Spielberg. Le duo se réunit ainsi une fois de plus, après leur travail commun sur La Quatrième dimensionGremlins et L’Aventure IntérieureSmall Soldiers raconte l’assaut d’une petite bourgade américaine par des jouets guerriers dans lesquels ont été implantées des puces informatiques provenant d’un stock militaire. L’affrontement entre le commando d’élite, sortes de Rambo en plastique, et les Gorgonites, des extra-terrestres pacifiques, sème bientôt une joyeuse panique… A cette occasion, les artistes d’ILM et de l’atelier Stan Winston (dont le travail conjoint avait donné naissance aux tours de magies inégalés de Terminator 2 et Jurassic Park) unissent une fois de plus leurs efforts. La scène la plus spectaculaire du film, où des centaines de mini-soldats attaquent une maison, fait intervenir pas moins de 350 personnages. Cette performance est d’autant plus étonnante que les images de synthèse relaient les marionnettes animatroniques de manière tout à fait imperceptible, leur intégration dans les prises de vues réelles atteignant une perfection quasi-absolue.

Toujours féru de références cinéphiliques, Dante confie la voix des jouets soldats à Ernest Borgnine, George Kennedy, Clint Walter et Jim Brown, qui incarnèrent en 1967 Les Douze salopards dont ils réinterprètent ici les plus célèbres répliques avec une énergie très communicative. Avec en prime quelques détournements d’autres dialogues célèbres, notamment cette déclaration exaltée du major Chip Hazard (Tommy Lee Jones) : « J’aime l’odeur du polyuréthane au petit matin ! » Autre clin d’œil savoureux : La Fiancée de Frankenstein, dont la partition de Franz Waxman est recyclée au moment où les soldats donnent vie aux poupées Gwendy (parodies évidentes des Barbies) et les transforment en redoutables guerrières.

La rançon de l'anticonformisme

Si l’industrie du jouet et la bêtise militaire sont évidemment en ligne de mire de l’impertinent scénario de Small Soldier, œuvre collective de Gavin Scott, Adam Rifkin, Ted Elliott et Terry Rossio, le film s’apprécie aussi comme une fable anti-raciste prônant le droit à la différence. Comment interpréter autrement l’attitude de ces fiers soldats 100% américains – le plastique n’est évidemment que métaphorique – prêts à en découdre avec leurs ennemis pour la simple raison qu’ils sont laids et contrefaits ? L’un des thèmes récurrents du cinéma fantastique, de Freaks à Edward aux Mains d’Argent, trouve donc ici un nouveau terrain d’expression. Comme chez Tod Browning et Tim Burton, le plus monstrueux n’est pas celui que l’on croit. Frank Langella, qui prête sa voix à Archer, chef des Gorgonites dont les traits félins ne sont pas sans évoquer le maquillage de Jean Marais dans La Belle et la Bête, cultive ce paradoxe à travers son interoprétation feutrée laissant saillir une humanité infinie et une sagesse profonde. Satirique, hilarant, bourré d’action et de surprises, Small Soldiers est un petit bijou qui méritait bien mieux que l’accueil tiédasse que lui réserva le public au moment de sa sortie, ne lui permettant de rembourser son budget de quarante millions de dollars que bien tardivement. Joe Dante serait-il décidément trop anticonformiste pour plaire au plus grand nombre ?

 

© Gilles Penso

Partagez cet article