LES AVENTURES D’UN HOMME INVISIBLE (1992)

John Carpenter s'essaie à la comédie de science-fiction à travers cette superproduction taillée sur mesure pour Chevy Chase

MEMOIRS OF AN INVISIBLE MAN

1992 – USA

Réalisé par John Carpenter

Avec Chevy Chase, Daryl Hannah, Sam Neill, Michael McKean, Stephen Tobolowsky, Jim Norton, Pat Skipper, Paul Perri

THEMA HOMMES INVISIBLES I SAGA JOHN CARPENTER

Au début des années 90, John Carpenter venait d’enchaîner deux petits films fantastiques aux budgets modestes, bourrés de charme et de bonnes idées, Invasion Los Angeles et Prince des Ténèbres, mais l’accueil du public ne fut pas à la hauteur des espoirs qu’il y misa. Dans la foulée, il se laissa donc tenter par un bon gros film de commande de quarante millions de dollars, adaptant un roman d’H.F. Saint. Suite à un étrange concours de circonstance, son héros, Nick Holloway (Chevy Chase), est contaminé après une explosion dans un centre de recherche et se retrouve invisible, prisonnier dans le bâtiment encerclé par des hommes des services secrets. Lorsque David Jenkins (Sam Neill) réalise ce qui vient de se passer, il souhaite transformer Nick en agent secret au service de la CIA. Mais ce dernier a d’autres projets…

Plutôt habitué aux budgets réduits et aux producteurs peu contraignants, John Carpenter n’a pas doté ce film de sa « patte » si spécifique (un travers qui était déjà partiellement apparent dans Starman, l’autre superproduction de SF du cinéaste). Du coup, sa mise en scène n’est jamais vraiment stylisée dans Les Aventures d’un Homme Invisible, sauf en de très rares moments, comme lorsque le héros, au début du film, s’endort pendant une conférence, le son se distordant peu à peu dans sa tête. Cela dit, cette variation sur un thème connu ne manque ni de rythme, ni de charme, et la prestation de Chevy Chase y est pour beaucoup. Le ton général et l’ambiance évoquent bien plus la série télévisée de Harve Bennett, mettant en vedette David Mc Callum, qu’Herbert George Wells ou, par extension, le film de James Whale. 

Une star ne peut pas rester invisible

On notera au passage l’idée intéressante de montrer au spectateur le visage du héros lorsqu’il est seul, et d’utiliser des effets d’invisibilités lorsqu’il est vu par d’autres, ce qui favorise l’identification du public au personnage. Nul doute que cette décision fut également dictée par la présence de Chase, un comédien trop populaire – et trop bien payé ! – pour ne pas montrer son visage à l’écran. Les magnifiques effets visuels d’ILM supervisés par Bruce Nicholson, jamais démonstratifs, reposent en grande partie sur les déshabillages et les déplacements d’objets, déjà excellemment mis en scène près de soixante ans auparavant par John P. Fulton. Mais certaines innovations laissent assez stupéfait : le chewing-gum qui se mâche tout seul, les aliments qui se dirigent vers l’estomac, les poumons enfumés, les gouttes de pluie qui se déposent sur une silhouette à peine perceptible… Des effets jamais vus, c’est le cas de le dire ! Pour y parvenir, toutes les techniques possibles et imaginables furent mises à contribution : les tournages sur fond bleu, l’animation image par image, les marionnettes, les caméras pilotées par ordinateur mais aussi les trucages numériques, alors en plein essor. Dommage que la jolie Daryl Hannah n’ait pas un rôle plus consistant et que le happy-end ouvert vers une suite possible (qui ne vit jamais le jour étant donné l’échec du film au box-office) cède tant à la facilité, au raccourci rapide et au manque de subtilité.

 

© Gilles Penso

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