« Ce qui est visible n’est que le reflet de ce qui est invisible. »
(Rabbi Abba)
Partant du principe que ce qui nous effraie le plus est ce qui se soustrait à nos regards, les cinéastes praticiens du fantastique se sont amusés à mettre en scène les réactions de l’homme face à des semblables – souvent mal intentionnés – devenus visuellement insaisissables. Mais moins que l’incrédulité de personnages quotidiens confrontés à l’invisible, le cinéaste s’intéresse surtout aux conséquences psychologiques souvent désastreuses de l’homme soudain masqué aux yeux de tous. Car si ce pouvoir tente tout le monde – qui n’a jamais rêvé d’agir sans être vu ? – il dévore de l’intérieur celui qui en est doté, car il aliène son détenteur et le place en marge du reste de l’humanité. C’est du moins ce que racontent les récits mettant en scène les hommes invisibles.
Bien avant que Herbert George Wells ne popularise le thème avec son roman “L’Homme Invisible” en 1897, ce motif était déjà présent dans la mythologie antique, notamment à travers l’histoire du berger Gygès. Découvrant un jour un anneau capable de le faire disparaître du regard d’autrui, le brave homme se pervertit, assassina le roi de Lydie, s’emparant de son trône et de son épouse. Lorsque Frodon découvre un anneau doté des mêmes capacités dans “Le Seigneur des Anneaux” de Tolkien, il sait que son port prolongé finira par altérer sa personnalité. Dans les contes populaires comme dans la littérature fantastique, l’invisibilité est donc vécue davantage comme une malédiction que comme une bénédiction, ce que l’écran perpétuera allègrement.
FILMS CHRONIQUÉS
1933: L’Homme Invisible de James Whale
1940: Le Retour de l’Homme Invisible de Joe May
1940: La Femme invisible de A. Edward Sutherland
1942: L’Homme Invisible contre la Gestapo d’Edwin L. Marin
1944: La Revanche de l’homme invisible de Ford Beebe
1948: Deux nigauds contre Frankenstein de Charles T. Barton
1949: L’Homme invisible apparaît de Shinsei Adachi et Shigehiro Fukushima
1951: Deux nigauds contre l’homme invisible de Charles Lamont
1954: Le Vengeur invisible de Motoyoshi Oda
1957: L’Homme invisible contre la mouche humaine de Mitsuo Murayama
1960: L’Incroyable homme invisible d’Edgar G. Ulmer
1970: Orloff et l’homme invisible de Pierre Chevalier
1984: L’Homme invisible d’Aleksandr Zakharov
1992: Les Aventures d’un Homme Invisible de John Carpenter
1993: Invisible: les aventures de Benjamin Knight de Jack Ersgard
2000: L’Homme sans ombre de Paul Verhoeven
2003: La Ligue des Gentlemen extraordinaires de Stephen Norrington
2006: L’Homme sans ombre 2 de Claudio Faeh
2020: Invisible Man de Leigh Whannell