BATMAN – LE FILM (1966)

La série TV kitschissime des années 60 se transforme en long-métrage tout aussi délirant, multicolore et décomplexé

BATMAN – THE MOVIE

 

1966 – USA

 

Réalisé par Leslie H. Martinson

 

Avec Adam West, Burt Ward, Lee Meriwether, Cesar Romero, Burgess Meredith, Frank Gorshin, Alan Napier

 

THEMA SUPER-HÉROS I SAGA BATMAN I DC COMICS

Imaginé en 1939 par Bob Kane et Bill Finger pour le n°27 de la revue Detective Comics, Batman creva l’écran dès les années quarante à l’occasion de deux serials jouant la carte de l’aventure feuilletonnante : Batman de Lambert Hillyer en 1943, et Batman & Robin de Spencer Gordon Bennett en 1949, avec respectivement Lewis Wilson et Robert Lovery sous le masque noir. Mais c’est surtout la série télévisée semi-parodique Batman réalisée par William Dozier entre 1966 et 1968, avec Adam West dans le rôle titre, qui marqua les mémoires. Le succès de cette adaptation délicieusement kitsch fut tel qu’une variante pour le grand écran s’offrit généreusement aux spectateurs dès 1966, sous la houlette du réalisateur Leslie H. Martinson. Dans ce long-métrage excessif, tourné entre les deux premières saisons de la série, l’homme chauve-souris et son fidèle Robin entrent en lutte contre les quatre grands du crime qui ont enlevé l’inventeur d’un procédé permettant de déshydrater les corps et de les réduire, avant de kidnapper les membres du conseil de sécurité de l’ONU.

Reprenant très fidèlement tous les éléments thématiques, stylistiques et narratifs de la série TV, ce Batman version cinéma est parfaitement grotesque si on se contente de l’appréhender tel quel au premier degré, mais s’avère tout à fait savoureux lorsqu’on se prend au jeu du pastiche au second degré. L’une des scènes les plus hilarantes, à ce titre, est cette course effrénée de Batman soucieux de se débarrasser d’une bombe sur un port peuplé de badauds innocents, de couples d’amoureux, d’enfants jouant ou de canards s’ébattant gaiment ! D’emblée, le ton du film est donné avec ce requin tenace (en caoutchouc bien sûr) qui s’accroche à la jambe du justicier, suspendu au bout d’une échelle au Batcoptère piloté par le « petit génie » Robin. Après avoir vainement tenté de chasser le squale, Batman s’en débarrasse à l’aide d’un vaporisateur « anti-requins » !

Le best-of des super-vilains

Les vilains les plus populaires de la série (le Joker, le Pingouin, le Sphinx et Catwoman) unissent ici leurs forces pour perpétrer leurs méfaits, comme pour donner à ce film les allures d’un « best of ». Si les trois premiers super-méchants rivalisent de ridicule, une touche sexy bienvenue nous est offerte par la femme chat (Lee Meriwether) dont la contrepartie en civil, Miss Kitka, séduit Bruce Wayne dans les grandes règles de l’art : dîner au violon, promenade nocturne dans un fiacre, dernier verre dans un luxueux appartement, le tout dans une ambiance délicieusement sixties digne d’un film de Blake Edwards. Au détour de ses débordements cartoonesques, le film se permet parfois quelques jolies envolées lyriques, notamment lorsque les vilains chevauchent des parapluies, comme des sorcières qui se seraient échappées du Magicien d’Oz. Relatif échec au box-office, ce Batman déçut un public qui s’attendait sans doute à autre chose qu’une simple répétition des épisodes télévisés sous forme de long métrage. Aujourd’hui, bien sûr, les amateurs de kitsch le revoient inlassablement avec une délectation toujours accrue.

 

© Gilles Penso

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