Peu à peu, la raison de Manning vacille. Lorsqu’il déclare à un sergent venu l’alimenter « ce n’est pas moi qui grandis, c’est toi qui rapetisses », on sent bien que les choses vont mal tourner. Effectivement, le colosse, chauve comme Monsieur Propre, gras comme un catcheur mexicain et haut de douze mètres, s’échappe bientôt et sème la panique à Las Vegas. La séquence paie son tribut à King Kong, qui demeure l’une des influences majeures du réalisateur. Manning détruit ainsi les bâtiments, épie une jeune femme dans son bain, enlève sa fiancée, et tient la dragée haute aux autorités du haut du gigantesque barrage de Boulder Dam. L’impact de ce climax est hélas amenuisé par des trucages maladroits qui ont tendance à donner au colosse les allures d’un fantôme transparent. Si l’on retiendra du film quelques scènes gentiment cocasses, comme les savants trimballant une énorme seringue pour injecter un antidote au monstre, ou ce chameau et cet éléphant miniaturisés qui servent de cobayes aux scientifiques, Le Fantastique homme colosse se distingue surtout par le caractère pathétique de son récit, fort bien véhiculé par le comédien Glenn Langan dont ce sera le seul titre de gloire.
© Gilles Penso