LÂCHEZ LES MONSTRES ! (1970)

Vincent Price, Peter Cushing et Christopher Lee partagent l’affiche de ce film d’horreur atypique déclinant le mythe de Frankenstein…

SCREAM AND SCREAM AGAIN

 

1970 – GB

 

Réalisé par Gordon Hessler

 

Avec Vincent Price, Christopher Lee, Peter Cushing, Alfred Marks, Christopher Matthews, Judy Huxtable, Yutte Stensgaard

 

THEMA MÉDECINE EN FOLIE

Futur réalisateur des Crocs de Satan et du Voyage fantastique de Sinbad, le cinéaste britannique Gordon Hessler signe avec Lâchez les monstres ! un film étrange s’efforçant de marier l’horreur, la science-fiction, l’espionnage, l’enquête policière, la politique-fiction et l’humour noir. Le démarrage de l’intrigue, pour le moins confus, enchaîne des séquences bizarres qui semblent n’avoir aucun rapport les unes avec les autres. Un homme en train de faire son jogging s’évanouit et se réveille dans un hôpital pour découvrir qu’il a été amputé d’une jambe ; des policiers enquêtent sur l’agression sexuelle et le meurtre particulièrement violent d’une jeune femme ; les généraux d’un gouvernement dictatorial non déterminé échafaudent de nébuleuses stratégies ; un homme rencontre une femme dans un night-club et l’assassine ; deux prisonniers tentent de s’évader d’un camp militaire mais sont rattrapés et torturés… Autant dire que dans un premier temps, il est difficile de s’impliquer dans le film, tant le scénario accumule les étrangetés sans s’efforcer de tisser le moindre lien entre ces saynètes insolites. L’effet recherché est manifestement le mystère et la curiosité, mais cette technique narrative s’avère risquée, car la tentation de décrocher est grande face à un récit aussi décousu.

Lâchez les monstres ! commence à captiver vraiment lorsque la police se lance sur les traces d’un tueur qui semble invincible et qui suce le sang de ses victimes. Après une poursuite automobile qui semble faire écho à celle de Bullit (sorti l’année précédente sur les écrans), le meurtrier, fort comme dix hommes, escalade une falaise à toute vitesse, en une séquence surprenante qui n’a rien à envier à Spider-Man. Lorsqu’il est enfin capturé et menotté, il s’arrache carrément la main pour prendre la fuite, avant d’achever sa folle cavalcade en se jetant dans une cuve d’acide. Le scénario n’étant pas l’œuvre de surréalistes adeptes des cadavres exquis, toutes les pièces du puzzle finissent tout de même par s’assembler pour révéler les activités hors normes d’un bon vieux savant fou incarné par Vincent Price, le docteur Browning (dont le nom est un hommage manifeste au réalisateur de Dracula et Freaks).

Les surhommes du docteur Browning

Celui-ci fabrique des êtres composites en assemblant les membres et les organes de donneurs non consentants. Le résultat est censé être une race de surhommes insensibles à la douleur et physiquement parfaits. Mais ces monstres de Frankenstein d’un nouveau genre s’avèrent incontrôlables, et lorsque plusieurs gouvernements se disputent la découverte pour la muer en arme redoutable, Browning déchante carrément. Bien qu’en tête d’affiche, Christopher Lee et Peter Cushing ne font ici que de très brèves et très frustrantes apparitions. Quant à Vincent Price, il n’a droit qu’à une seule scène digne de ce nom, à la toute fin du film. Tout s’explique donc au cours de la dernière bobine, mais entre les spectateurs ayant abandonné le film faute de patience et ceux s’avérant désenchantés par un fin mot de l’histoire arpentant des sentiers maintes fois foulés, Lâchez les monstres ! a toutes les chances de décevoir. Et ce malgré une collection de séquences mémorables, une violence et un érotisme assez crus pour l’époque, et une poignée de comédiens tout à fait convaincants.

 

© Gilles Penso


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