LES DÉCIMALES DU FUTUR (1973)

Un film de science-fiction inclassable et psychédélique dans lequel une technologie futuriste est sollicitée pour créer un nouveau messie…

THE FINAL PROGRAMME

 

1973 – GB

 

Réalisé par Robert Fuest

 

Avec Jon Finch, Jenny Runacre, Hugh Griffith, Patrick Magee, Sterling Hayden, Harry Andrews, Julie Ege, Graham Crowden

 

THEMA MÉDECINE EN FOLIE I FUTUR

Robert Fuest restera dans les mémoires comme l’homme qui réalisa L’Abominable docteur Phibes et sa séquelle. Mais juste après les exploits du grandiloquent super-vilain incarné par Vincent Price, Fuest décida de mettre son exubérance au service d’un autre film fou, empruntant cette fois-ci les voies d’une science-fiction atypique. D’où cet inclassable Les Décimales du futur, inspiré d’un roman de Michael Morcook, sur lequel Fuest assura également le rôle de directeur artistique. Lorsque le récit commence, l’éminent biophysicien Alexandre Cornélius vient de mourir en Laponie, où il vivait depuis neuf ans. Ses recherches en cinétique avancée ayant été laissées en plan, le monde tourne désormais ses yeux vers Jerry (John Finch), son fils aîné, lauréat du prix Nobel. Ce dernier, un dandy oisif et dilettante, commence par traîner sa silhouette dégingandée chez un ami major excentrique (Sterling Hayden) dans le but de récupérer un jet, puis se renseigne sur l’achat éventuel d’une certaine quantité de napalm.

Nous voici donc dans un univers absurde proche de l’atmosphère décalée de Chapeau melon et bottes de cuir, impression renforcée par les décors proprement hallucinants qui s’étalent tout au long du film : salle de jeu en forme de flipper géant, grand hall de la maison Cornélius équipé d’un échiquier mural, restaurant au milieu duquel trône un ring dédié aux combats de catch dans la boue… La mode vestimentaire, quant à elle, n’a rien à envier à celle d’Orange mécanique, les deux films se déroulant dans le même type de futur indéterminé. Ici, les personnages s’affrontent avec des pistolets-seringues translucides, tandis que certains prophètes annoncent une fin du monde imminente. Un cynisme permanent s’exhale notamment via les dialogues, comme lorsqu’une infirmière explique à notre héros : « il est plus facile de diriger un hôpital quand tous les patients dorment », ce à quoi Cornélius rétorque : « ça serait aussi la meilleure façon de diriger le monde. »

« L’être humain parfait »

A vrai dire, l’intrigue des Décimales du futur s’avère rapidement confuse, tout le monde courant après un microfilm qui appartenait au père Cornélius. Pour qui n’est pas familier avec le roman initial, l’ensemble manque sérieusement de clarté et de cohérence. Et tout s’achève face au gigantesque ordinateur DUEL, alimenté par les cerveaux les plus brillants d’Europe. Cette machine possède ainsi la somme de toutes les connaissances humaines. Le but de l’opération est de la mettre à contribution pour créer un être humain parfait, hermaphrodite, auto-fertilisant, auto-régénérateur et immortel. En ces temps troublés, un tel être serait accueilli comme rien moins que le nouveau messie. Et pour lui donner naissance, il suffit de placer dans un grand incubateur solaire un homme et une femme triés sur le volet. Or le choix s’est porté sur Jerry Cornélius et la sémillante Miss Bruner (Jenny Runacre). Film OVNI échappant aux classifications, Les Décimales du futur s’apprécie surtout comme un témoignage du cinéma british le plus déjanté qu’aient pu engendrer les seventies psychédéliques. Au détour du casting, on retrouve avec plaisir cette bonne trogne de Patrick Magee, dans son rôle favori de vieil excentrique misanthrope.

 

© Gilles Penso


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