L’INCROYABLE ALLIGATOR (1980)

Ne jetez pas les bébés alligators dans les toilettes : ils peuvent se transformer en monstres géants avides de chair humaine !

ALLIGATOR

 

1980 – USA

 

Réalisé par Lewis Teague

 

Avec Robert Forster, Robin Riker, Michael Gazzo, Jack Carter, Dean Jagger, Sydney Lassick, Perry Lang, Sue Lyon, Henry Silva, Bart Braveman

 

THEMA REPTILES ET VOLATILES

Auteur du scénario de Piranhas, John Sayles conserve le même ton et les mêmes thématiques avec cet Incroyable alligator jonglant volontiers entre le premier et le second degré et payant son tribut aux Dents de la mer. Sayles est d’ailleurs très occupé en cette année 1980, puisqu’il écrit en même temps le script des Mercenaires de l’espace et de Night Skies, un projet de Steven Spielberg qui sera finalement abandonné au profit de E.T. l’extra-terrestre. Envisagé pour mettre en scène L’Incroyable alligator, Joe Dante prépare à l’époque Hurlements et cède donc le pas à Lewis Teague, réalisateur de deux films policiers et d’une poignée d’épisodes de séries TV. L’Incroyable alligator puise son inspiration dans une célèbre légende urbaine et commence sans s’embarrasser de longs préambules. Pas du tout refroidie par l’accident auquel elle assiste pendant un spectacle dans une ferme aux crocodiles, et qui manque de coûter la vie à l’un des dresseurs, une petite fille insiste auprès de sa mère pour acheter un bébé alligator. Son père, exaspéré, jette l’animal dans les WC. Douze ans plus tard, le reptile, qui s’est acclimaté au monde souterrain où il trouve sa pitance, a bien grandi, alimenté par un laboratoire qui jette clandestinement dans les égouts des cadavres de chiens sur lesquels on expérimente de nouvelles hormones. Dès lors, un monstre plus gros qu’une voiture hante les sous-sols de la ville et dévore tout ce qui lui tombe sous la dent…

Marqué par la mort de son ancien co-équipier, le policier David Madison (Robert Forster) est chargé d’enquêter sur la série de disparitions mystérieuses qui frappe la ville et sur les morceaux de cadavres qu’on découvre près des égouts. Or un autre de ses collègues meurt justement pendant leurs investigations. Madison annonce à qui veut l’entendre que le coupable est un alligator géant, mais personne ne croit à sa thèse, jusqu’à ce qu’un journaliste trop curieux ne prenne lui-même des photos dans les égouts. Si ce reporter finit dévoré, sa pellicule lui survit. Et face aux clichés, il faut se rendre à l’évidence : un monstre à écailles rôde sous la terre. Après que l’armée ait organisé une battue en vain, le film troque l’influence des Dents de la mer contre celle de Godzilla. Car au cours d’une séquence nocturne d’anthologie, l’alligator défonce le pavé et s’extirpe du sous-sol, attaquant les habitants à la surface. Très ingénieux, les trucages alternent un véritable saurien dans des décors miniatures (facilement repérables mais très soignés) et un alligator mécanique grandeur nature franchement réussi (surnommé « Ramon » par l’équipe du film, et ensuite offert à l’équipe de basket-ball des Florida Gators de l’Université de Gainesville).

Les dents de la terre

L’ombre des Dents de la mer reste malgré tout très présente. Car au-delà du monstre tapi dans l’ombre qui referme sa mâchoire sur tout ce qui bouge, le trio vedette du film est lui-même calqué sur celui du classique de Spielberg : le flic qui veut en découdre (Forster prenant donc la relève de Roy Scheider), le jeune membre de la communauté scientifique (ici une belle herpétologue incarnée par Robin Riker dont notre policier finit par s’enticher) et le chasseur bourru et imbu de lui-même (joué par Heny Silva, qui s’amuse à imiter suavement le cri des alligators devant les journalistes !). Lewis Teague ménage quelques séquences d’humour satirique délectables, comme le merchandising sauvage organisé autour d’une scène de crime, où les marchands ambulants proposent des sauriens en plastique, des peluches et même des bébés alligators. Le film ne s’interdit pas non plus quelques références à « Moby Dick », le protagoniste n’ayant bientôt plus d’autre but que de tuer la bête pour chasser ses propres démons, quitte à démissionner de la police pour continuer son combat « en free-lance ». Seul petit regret dans ce très sympathique monster-movie : l’absence de James Horner, qui écrivit pourtant la bande originale du film, mais qu’une grève empêcha d’enregistrer, cédant donc le pas au compositeur Craig Huxley. Véritable starting-block, L’Incroyable Alligator permit à son réalisateur de se voir confier quelques films de genre remarqués dans les années 80, notamment Cujo, Cat’s Eye et Le Diamant du Nil.

 

© Gilles Penso


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