REVENANTS (LES) (2012-2015)

Inspirée par le film du même titre, cette série raconte le retour à la vie de plusieurs hommes, femmes et enfants morts pourtant depuis des années…

LES REVENANTS

 

2012/2015 – FRANCE

 

Créée par Fabrice Gobert

 

Avec Anne Consigny, Clotilde Hesme, Frédéric Pierrot, Céline Sallette, Grégory Gadebois, Guillaume Gouix, Pierre Perrier, Yara Pilartz, Jean-François Sivadier

 

THEMA ZOMBIES

Le film Les Revenants, réalisé en 2004 par Robin Campillo, abordait sous un angle hyperréaliste – tant du point de vue social que psychologique – un postulat purement fantastique : le retour inexplicable à la vie de plusieurs millions de défunts qui réintégraient soudain notre monde et y cherchaient désespérément leur place. Fascinant à défaut d’être pleinement abouti, ce long-métrage possédait un potentiel qui méritait sans doute d’être exploité à nouveau. Le producteur Jimmy Desmarais y pense sérieusement quelques années après sa sortie, non sous la forme d’une suite cinématographique mais plutôt d’une déclinaison destinée aux petits écrans. La chaîne Canal + s’intéresse à cette idée et c’est ainsi que Les Revenants se transforme en série TV. Logiquement sollicité, Robin Campillo préfère passer son tour. « J’ai dit non parce que pour moi c’était passé, j’avais tourné la page, et je ne me voyais pas travailler avec d’autres scénaristes, d’être un peu le gardien du temple », explique-t-il. « A partir du moment où on accepte de céder ses droits, il faut laisser les gens absolument libres. Je pense que ça aurait été une perte de temps et ça aurait créé des quiproquos inutiles » (1). C’est donc le réalisateur Fabrice Gobert, dont le film Simon Werner a disparu a beaucoup fait parler de lui, qui hérite du bébé. Pour trouver la juste tonalité, Gobert cherche l’inspiration du côté de Morse, qui parvenait à intégrer un argument fantastique dans un contexte très réaliste, et de Twin Peaks, pour son jeu permanent avec l’inquiétante étrangeté.

L’une des premières idées de la série est d’aborder le phénomène à très grande échelle et de raconter, comme dans le film, la résurrection de millions d’êtres humains. Mais il devient vite clair qu’une approche restreinte et intimiste du phénomène sera plus appropriée à cette relecture des Revenants. L’intrigue se situe donc dans une petite ville française perchée dans les montagnes et longeant un lac artificiel qui s’adosse à un très grand barrage. Du jour au lendemain, sans explication, plusieurs trépassés réapparaissent en même temps, indemnes et bien vivants. Il s’agit de Camille, une gamine tuée dans un accident de bus quatre ans plus tôt ; de Simon, un jeune homme qui s’est suicidé il y a une décennie et qui cherche sa fiancée ; de Madame Costa, qui vient rendre visite à son époux comme si de rien n’était ; de Serge, un tueur en série assassiné par son propre frère ; ou encore de ce petit garçon muet qui s’attache soudain à une infirmière… Pourquoi sont-ils revenus ? Que faire d’eux désormais ? Doit-on les cacher ou les exposer au grand jour ?

D’entre les morts

La série de Fabrice Gobert ne se contente pas d’accommoder sur un format plus long le concept du film de Robin Campillo. Elle le prolonge, l’enrichit, l’approfondit tout en prenant ses distances avec son modèle pour affirmer sa propre identité. Le choix des décors contribue beaucoup à l’atmosphère insolite et mélancolique des Revenants : ces panoramas montagneux filmés à Annecy et dans ses environs, ce gigantesque barrage édifié à Tignes… C’est dans ce cadre très français et pourtant étrangement universel que se noue le drame à échelle humaine. La brochette de comédiens dirigée par Gobert nous fait croire à l’impensable avec beaucoup de conviction. Frédéric Pierrot et Anne Consigny en parents incrédules face au retour de leur enfant, Clotilde Hesme en fiancée endeuillée persuadée que son défunt bien-aimé revient la hanter, Céline Sallette en infirmière solitaire s’inventant un neveu revenu de l’au-delà, Guillaume Gouix en serial-killer revenu d’entre les morts, tous nous saisissent par leur justesse, dans un contexte où le réalisme n’est pourtant pas simple à convoquer. C’est justement cet équilibre délicat entre le fantastique et l’ordinaire qui permet aux Revenants de distiller son étrange parfum, s’affirmant comme une série d’exception dont la mise en forme extrêmement soignée (photographie, musique, mise en scène ciselée) force le respect. Les huit premiers épisodes laissent ouvertes beaucoup de portes que la seconde saison (diffusée trois ans plus tard) ne parviendra pas à exploiter correctement, l’intérêt des téléspectateurs s’étant entretemps émoussé. En 2015, Les Revenants donnera naissance The Returned, un remake américain n’ayant pas vraiment la même saveur.

 

(1) Extrait d’une interview réalisée pour le site Allociné en mars 2014.

 

© Gilles Penso


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