THE POD GENERATION (2023)

Dans le futur, les femmes n’auront plus besoin d’être enceintes ou d’accoucher pour avoir un bébé : on n’arrête plus le progrès !

THE POD GENERATION

 

2023 – BELGIQUE / FRANCE / GB

 

Réalisé par Sophie Bathes

 

Avec Emilia Clarke, Chiwetel Ejiofor, Vinette Robinson, Veerle Dejaeger, Lamara Stridjhaftig, Emma De Poot, Kyoung Her, Karel Van Cutsem, David Beelen

 

THEMA FUTUR I MÉDECINE EN FOLIE

Après avoir réalisé la comédie fantastique Âmes en stock (avec Paul Giamatti) et une version personnelle de Madame Bovary (avec Mia Wasikowska), Sophie Barthes s’intéresse au rapport complexe à la maternité qu’entretient un couple de new-yorkais dans un monde futur très proche du nôtre. Ce troisième long-métrage, une co-production entre la Belgique, la France et le Royaume Uni, met en scène Emilia Clarke (la « reine des dragons » de Game of Thrones) et Chiwetel Ejiofor (le héros de 12 Years a Slave). Par sa nature même, c’est déjà un film atypique. Dans la cité d’anticipation de The Pod Generation, les assistants virtuels sont partout, commentant nos gestes et nos humeurs, prodiguant sans cesse des conseils, préparant les repas et les loisirs de chacun. La productivité des salariés est désormais mesurée par des algorithmes, les thérapeutes ne sont plus des humains, les forêts sont majoritairement holographiques, l’air frais se consomme dans les bars, l’éducation n’est plus financée par le gouvernement et – petite nouveauté qui va bouleverser bien des habitudes – on peut désormais se passer de grossesse et d’accouchement pour faire des bébés !

« Confiez-nous la phase la plus contraignante et profitez de vos bébés » affirme avec jovialité le patron de la toute puissante entreprise Pegazus qui commercialise les pods, des œufs synthétiques connectés qui abritent les embryons pendant neuf mois jusqu’à leur naissance. Toutes les campagnes marketing de Pegazus vantent les mérites d’une société où la femme pourra enfin continuer à s’épanouir professionnellement sans avoir à subir les inconvénients d’une grossesse. Rachel (Emilia Clarke), pleinement intégrée dans une entreprise où elle ne cesse de démontrer son efficacité, est fortement tentée par l’option du pod mais n’ose pas en parler à son mari Alvy (Chiwetel Ejiofor). Car ce dernier est en parfait décalage avec la tournure qu’est en train de prendre le monde. Il est botaniste, s’intéresse à la terre, aux plantes, aux feuilles et aux arbres. Lorsqu’elle apprend quel est le métier d’Alvy, la DRH de Rachel fait la grimace avant d’avancer : « je suppose donc que vous êtes la source principale des revenus du foyer ? » Dans cette société moderne où l’intelligence artificielle est partout, l’amour de la nature n’est pas un atout mais plutôt un vestige obsolète du passé. Comment Alvy réagira-t-il en apprenant que Rachel s’est inscrite sur une liste d’attente chez Pegazus et vient d’être admise pour acquérir son précieux pod ?

Contre-nature

Parfaitement dans l’air du temps, The Pod Generation soulève les problématiques de son temps. « Le progrès ne rend personne superflu, il nous complète » s’entend ainsi dire une salariée qui s’inquiète de voir des machines intelligentes se substituer peu à peu à ses collègues. Sophie Barthes s’efforce de filmer cet univers aseptisé avec un maximum de naturalisme, sans jamais insister sur les éléments de science-fiction qui sont donc intégrés comme des composantes banales de l’environnement et de l’intrigue. Mais il est évident que ce futur proche est une dictature douce et sans douleur, un totalitarisme insidieux qui ne dit pas son nom. La déshumanisation s’y installe tranquillement, derrière les sourires commerciaux des grands patrons qui prétendent ne vouloir que le bien de leurs semblables. The Pod Generation s’appuie sur la performance très convaincante de ses acteurs principaux qui se prêtent au jeu comme dans une comédie dramatique « traditionnelle » et renforcent la crédibilité de cet avenir décidément très plausible. Dommage que le scénario peine à exploiter pleinement ses prémices fascinantes. L’hymne à la nature finit par se révéler trop démonstratif et la résolution déçoit par sa simplicité et son absence de prise de risques. Il manque clairement au film un dernier acte digne de ce nom, et l’on en vient à se demander si un tel sujet n’aurait pas eu plus d’impact sur un format plus court… dans un épisode de Black Mirror par exemple.

 

© Gilles Penso


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