REBELLE (2012)

Le premier film « féministe » de Pixar met en scène une jeune héroïne contestataire piégée par le maléfice d’une vieille sorcière…

BRAVE

 

2012 – USA

 

Réalisé par Mark Andrews, Brenda Chapman et Steve Purcell

 

Avec les voix de Kelly Macdonald, Billy Connolly, Emma Thompson, Julie Walters, Robbie Coltrane, Kevin McKidd, Craig Ferguson, Sally Kinghorn, Elidh Fraser

 

THEMA SORCELLERIE ET MAGIE I SAGA PIXAR

C’est à Brenda Chapman que nous devons la genèse du film Rebelle. Après avoir participé à l’écriture de plusieurs longs-métrages Disney comme La Belle et la Bête, Le Roi lion ou Le Bossu de Notre-Dame, elle rejoint les rangs du studio d’animation Dreamworks et co-réalise avec Steve Hickner et Simon Wells le remarquable Prince d’Égypte. C’est aussi pour Dreamworks qu’elle co-écrit le film Chicken Run du studio Aardman. En 2006, elle intègre l’équipe de Pixar et collabore au scénario de Cars. C’est alors qu’elle fait part à John Lasseter du projet Rebelle. L’histoire de cette princesse en butte à l’autorité lui est inspirée par sa propre relation avec sa fille. Mais le scénario du film ne prend forme qu’au bout de quatre ans de travail. A mi-parcours, Mark Andrews finalise l’écriture et co-réalise le film, à la demande de John Lasseter et Ed Catmull. Cette passation de pouvoir n’est pas très bien perçue de l’extérieur, d’abord parce que laisser les commandes d’un long-métrage à une femme aurait été une première chez Pixar, ensuite parce que cette situation évoque le départ de Jan Pinkava qui avait quitté Ratatouille dans des conditions un peu similaires. Fair-play, Brenda Chapman affirmera plus tard que Rebelle, dans sa version finale, est très proche de ce qu’elle avait initialement en tête et s’avouera fière du film.

S’éloignant du cadre contemporain habituel des films Pixar, Rebelle se déroule dans un monde ancien féerique et met en vedette une jeune fille destinée à hériter des responsabilités d’un royaume dirigé par ses parents. Son héroïne Merida s’inscrit-elle donc dans la lignée de toutes les princesses Disney dont l’aïeule fut Blanche-Neige 75 ans plus tôt ? Oui et non. Car Merida (dont le nom signifie « rebelle » en hébreu) ne chante pas et ne vit pas de relation amoureuse. Elle passe son temps à lutter pour contrôler sa destinée et donc à refuser ce statut de princesse que tout le monde aimerait lui coller à la peau. Elle prend des cours d’escrime et de tir à l’arc, monte à cheval, pratique les activités généralement prévues pour les garçons, bref cherche à tout prix à éviter la vie toute tracée d’épouse de seigneur qu’on lui réserve. Cette démarche évoque celle de l’héroïne de Mulan, même si Merida s’en distingue par une effronterie qui confine à l’insolence. Elle ne cherche pas à imiter les garçons ou à infléchir une situation insoluble. Elle veut simplement atteindre une autonomie lui permettant de décider seule de son avenir. Pour l’aider à régler ses problèmes, la princesse rend visite à une vieille sorcière recluse dans un coin isolé du royaume. Mais le résultat ne sera pas du tout celui qu’elle attendait. Car un sort transforme bientôt sa mère en grande ourse ! Dès lors, toutes deux vont devoir œuvrer ensemble pour trouver le moyen d’inverser le sort…

La grande ourse

Mi-comique mi-dramatique, cette situation pour le moins inhabituelle pose la question de la barrière sociale qui empêche tout être humain de sombrer dans la bestialité. Comment la mère de Merida peut-elle conserver son humanité et ses bonnes manières dans la peau d’un ours livré à la sauvagerie du monde extérieur mais aussi des chasseurs qui en veulent à sa peau ? Si les personnages du film gardent une stylisation « cartoonesque » chère à l’esprit de Pixar, de nombreux détails – cheveux, poils, grain de peau, regards, costumes – troublent par leur réalisme extrême. Quant aux décors, ils ressemblent comme deux gouttes d’eau à des prises de vues réelles. Les expérimentations photo-réalistes entamées dans les premières séquences de Wall-E poursuivent donc ici leur élan avec des résultats souvent étourdissants. Rebelle permet une nouvelle fois à Pixar de remporter l’Oscar du meilleur film d’animation, ainsi qu’une foule d’autres récompenses à travers le monde, dont les prestigieux Bafta Award et Golden Globe. D’une manière générale, le film est très bien accueilli par le public et la critique, même s’il semble s’éloigner quelque peu de la singularité habituelle des univers Pixar pour s’approcher de ceux de Disney. La réalisation de Rebelle ayant été marquée par la mort de Steve Jobs, le film lui est dédié et plusieurs clins d’œil au créateur d’Apple jalonnent le métrage, notamment l’utilisation du nom de famille MacIntosh et la présence d’une pomme que l’héroïne essaie régulièrement de croquer.

 

© Gilles Penso


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