L’AMIE MORTELLE (1986)

Follement amoureux de sa jeune voisine tombée dans le coma, un lycéen surdoué décide de lui greffer le cerveau d’un robot…

DEADLY FRIEND

 

1986 – USA

 

Réalisé par Wes Craven

 

Avec Matthew Laborteaux, Kristy Swanson, Michael Sharrett, Anne Twomey, Anne Ramsey, Richard Marcus

 

THEMA ROBOTS I SAGA WES CRAVEN

Au milieu des années 80, le croquemitaine Freddy Krueger échappe à Wes Craven pour s’en aller griffer ailleurs, le regrettable La Colline a des yeux 2 (commis avant Les Griffes de la nuit en pleine période de vaches maigres) entame sa carrière anecdotique et le cinéaste se tourne momentanément vers le petit écran pour lequel il réalise Invitation pour l’enfer, Terreur froide et quelques épisodes de La Cinquième dimension. C’est L’Amie mortelle qui lui permet de repasser au grand écran et de s’attaquer à une facette du cinéma fantastique qu’il n’avait pas encore abordée frontalement : la science-fiction. Le scénario s’appuie sur le roman « Friend » de Diana Hentsell. Pour incarner le rôle complexe de la jeune fille du titre, Craven opte pour une comédienne de seize ans, Kristy Swanson, tout juste sortie du tournage de La Folle journée de Ferris Bueller. « J’ai eu l’impression que, parfois, les gens sur le plateau pensaient que j’étais juste une adolescente stupide qu’il fallait tenir par la main », se souvient-elle. « J’ai eu du mal à faire comprendre que même si j’étais jeune, j’étais une actrice professionnelle » (1). Fort heureusement, les choses s’arrangent en cours de route et Craven se révèle satisfait.

L’Amie Mortelle s’intéresse d’abord à Paul Conway (Matthew Laborteaux), un teenager de 15 ans qui vient d’entrer comme boursier au collège de Welling. Son compagnon de jeu est un robot, « BB », qu’il a fabriqué lui-même. Ce dernier, petite merveille technologique, semble être parfois victime de violentes « sautes d’humeur », comme s’il se forgeait seul son propre caractère. Paul tombe bientôt amoureux de Samantha (Kristy Swanson), sa jeune voisine qui vit sous la domination d’un père alcoolique et maladivement jaloux. Le soir de Thanksgiving, alors que Samantha rentre plus tard que d’habitude, son père lui assène un coup si violent qu’elle sombre dans le coma. Maintenu provisoirement en vie artificielle à l’hôpital, son corps est dérobé par Paul, avec l’aide d’un ami. Il décide de lui greffer le cerveau de « BB ». L’opération est un succès, et Samantha revient du royaume des morts. Mais il devient vite évident que quelque chose en elle a profondément changé…

She’s alive !

Si les prémisses du film laissent imaginer des digressions comiques héritées de Short Circuit, nous sommes ici beaucoup plus proches du thème de Frankenstein que du conte naïf de John Badham. Craven et son scénariste Bruce Joel Rubin ont tout de même édulcoré le roman initial, qui basculait volontiers dans le gore, décrivant la décomposition progressive de Samantha au fil de l’action, jusqu’à ce que des rats ne viennent la dévorer ! Si la deuxième partie du métrage accumule les meurtres parfois démesurés, c’est une volonté de Warner Bros imposée à Craven et Rubin contre leur gré. Les réactions des projections test ayant été tièdes, le studio réclame en effet de l’horreur graphique, poussant les deux hommes à concevoir des séquences parfois parfaitement absurdes (d’où la fameuse tête de la voisine acariâtre qui éclate comme une poupée de porcelaine !) et à dénaturer leur vision initiale, beaucoup plus portée sur la romance macabre que sur les mécanismes du slasher. Fatalement déséquilibré par ses élans contraires, L’Amie Mortelle ne se départit pas pour autant d’une certaine tendresse liée à son couple maudit, bénéficiant du jeu convainquant de ses jeunes comédiens.

 

(1) Extrait d’une interview publiée dans « Fangoria » en 1986.

 

© Gilles Penso


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