

Le réalisateur de The Loved Ones construit un diabolique cauchemar maritime où la voracité des requins se combine à la folie d’un psychopathe…
DANGEROUS ANIMALS
2025 – AUSTRALIE / USA / CANADA
Réalisé par Sean Byrne
Avec Hassie Harrison, Jai Courtney, Josh Heuston, Ella Newton, Liam Greinke, Rob Carlton, Ali Basoka, Michael Goldman, Carla Haynes, Dylan Eastland, Jon Quested
THEMA TUEURS I MONSTRES MARINS
Les amateurs du cinéaste australien Sean Byrne ont intérêt à s’armer de patience. Dix ans séparent Dangerous Animals de son prédécesseur The Devil’s Candy, lui-même sorti six ans après The Loved Ones. Cette attente parfois vertigineuse, s’explique par une double contrainte : l’exigence artistique du réalisateur et des difficultés de financement récurrentes. Mais lorsqu’il découvre un jour le scénario de Dangerous Animals sur son bureau, Byrne décide de foncer. « Il est écrit par Nick Lepard, une nouvelle voix, un nouveau scénariste », confie-t-il. « Dès que je l’ai lu, j’ai trouvé qu’il proposait une excellente fusion entre le film de tueur en série et le film de requins. C’est le premier script sur le sujet que je lisais qui ne diabolisait pas les squales. En réalité, ce ne sont pas des tueurs aveugles. Leur apparition obéit à une logique. L’homme, au fond, est souvent le véritable monstre. » (1) Car là repose toute l’originalité de Dangerous Animals. À l’instar du reptile anthropophage du Crocodile de la mort, le requin y est détourné de sa nature première pour devenir l’instrument des pulsions d’un psychopathe bien décidé à réinventer à sa façon la chaîne alimentaire.


Jai Courtney, que nous avions découvert en Captain Boomerang dans Suicide Squad, en Kyle Reese dans Terminator Genisys ou en Eric dans Divergente, prête sa silhouette robuste à Tucker, un capitaine fantasque qui propose aux touristes de faire un plongeon dans une cage pour pouvoir contempler les requins. Lui-même a survécu à une attaque de squales lorsqu’il était enfant, accident qui l’a marqué (psychologiquement mais aussi physiquement, comme en témoigne une énorme cicatrice à faire pâlir le Quint des Dents de la mer) et a changé sa vision de l’espèce. Les deux premiers touristes que nous découvrons à son bord nous permettent de comprendre très tôt qu’ils sont tombés dans la gueule du loup. Tucker poignarde en effet l’un d’entre eux, qu’il jette à la mer, et enferme l’autre dans sa cale. Avec un tel capitaine, la croisière ne s’amuse donc guère ! La surfeuse solitaire et marginale Zephyr (Hassie Harrison, la cowgirl Laramie de Yellowstone) s’apprête à en faire les frais…
Le prédateur
L’attente valait vraiment la peine. Car avec Dangerous Animals, Sean Byrne nous offre un cauchemar maritime comme on n’en avait pas connu depuis très longtemps. Redoutablement efficace, le suspense monte crescendo pour ne jamais laisser la moindre minute de répit aux spectateurs, en prenant bien soin de saborder un à un tous les espoirs et toutes les échappatoires possibles sur lesquels pouvait miser notre protagoniste. Les deux acteurs principaux prennent leurs rôles à bras le corps avec une implication physique impressionnante, sans laquelle Dangerous Animals n’aurait pas du tout le même impact. Il faut saluer là le génie du casting orchestré par Byrne. Courtney dévore littéralement l’écran, partagé entre la bonhomie débonnaire et la folie meurtrière pulsionnelle. Face à lui, Hassie Harrison campe avec beaucoup de conviction une proie bien déterminée à ne pas se laisser faire, une forte tête qui n’a – presque – rien à perdre. Si le film peut évoquer des œuvres telles que Calme blanc, Instinct de survie ou Wolf Creek, il ne ressemble à rien de connu et crée presque son propre genre, quelque part à mi-chemin entre le slasher et le film de monstres. L’ambiguïté avec laquelle sont filmés les requins, tour à tour impitoyables machines à dévorer ou splendides créatures marines, n’est pas la moindre singularité de Dangerous Animals, dont le titre, lui, se veut d’emblée très explicite : le plus dangereux des animaux n’est évidemment pas celui qu’on croit.
(1) Extrait d’une interview parue dans Filmmaker Magazine en juillet 2025.
© Gilles Penso
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