MOON 44 (1990)

Avant d’attaquer ses blockbusters les plus célèbres, Roland Emmerich signe ce thriller de science-fiction, visuellement soigné mais à l’intrigue bancale…

MOON 44

 

1990 – ALLEMAGNE

 

Réalisé par Roland Emmerich

 

Avec Michael Paré, Lisa Eichhorn, Dean Devlin, Brian Thompson, Malcolm McDowell, Stephen Geoffreys, Leon Rippy, Jochen Nickel, Mehmet Yilmaz

 

THEMA SPACE OPERA

Moon 44 est le quatrième long-métrage de Roland Emmerich, après L’Odyssée de l’Arche de Noé, Joey et Chasseur de fantômes, qui témoignaient déjà de son attrait inconditionnel pour le fantastique et la science-fiction. Mais l’homme n’est pas encore connu du grand public. Moon 44 marque un tournant dans sa carrière, puisqu’il s’agit de sa première collaboration avec le producteur Dean Devlin, son futur complice sur Stargate, Godzilla et Independence Day. Le film se tourne en grande partie à Sindelfingen, une ville industrielle du sud-ouest de l’Allemagne, où Roland Emmerich transforme d’anciens bâtiments d’usine en décors futuristes. Pour figurer le siège ultra-moderne de la Galactic Mining Corporation, le réalisateur s’offre même un détour par la mythique Ennis House de Los Angeles, célèbre pour son architecture signée Frank Lloyd Wright. Faute de budget confortable, Emmerich mise sur la débrouille et parvient à boucler le financement du film en revendant les droits de distribution à l’étranger avant même le tournage. Une manœuvre qui lui permet d’avancer au maximum, jusqu’au moment où l’argent vient à manquer, nécessitant un recours intensif au système D. Pour tourner un plan d’exposition crucial qu’il n’a pas eu le temps de mettre en boîte, il improvise avec des jeux de miroirs et quelques membres de l’équipe technique en guise de figurants. Pour la photographie, Emmerich sollicite Karl Walter Lindenlaub, futur chef opérateur d’Independence Day, et confie la musique à Joel Goldsmith, fils du célèbre Jerry Goldsmith, qui compose pour la première fois de sa carrière un score orchestral.

Tout commence par un vaisseau spatial, presque aussi long que celui de La Folle histoire de l’espace, qui traverse lentement le cosmos. Nous sommes en 2038 et les ressources naturelles de la Terre sont épuisées. Pour survivre, l’humanité exploite les derniers gisements minéraux disséminés à travers la galaxie. Alors que des multinationales se livrent une guerre féroce pour le contrôle de ces précieuses colonies, la planète Moon 44 reste l’un des derniers bastions encore aux mains d’une grande société minière. Mais les choses se compliquent : des navettes disparaissent mystérieusement, les robots extracteurs sont sabotés, et une puissance ennemie semble vouloir annexer la planète. Faute de volontaires, l’entreprise décide d’envoyer sur place des détenus en échange d’une réduction de peine. Ces condamnés sont chargés de piloter des hélicoptères dans une atmosphère impraticable, assistés à distance par de jeunes informaticiens surdoués. Parmi eux, Felix Stone (Michael Paré), un agent des affaires internes infiltré sous couverture. Sa mission : découvrir qui sabote les opérations…

Où est le méchant ?

L’univers de Moon 44 s’appuie sur des effets visuels très soignés et une direction artistique ambitieuse, même si l’ombre de Blade Runner plane en permanence sur le film. Le scénario, lui, n’est pas d’un fol intérêt, accumulant les saynètes pour s’acheminer lentement jusqu’à son dénouement sans vraiment passionner son public. Si l’intérêt reste en éveil, c’est grâce à la mise en scène très maîtrisée de Roland Emmerich et au jeu fort convaincant de ses comédiens, même si Michael Paré, en héros fatigué et imperturbable, et Malcolm MacDowell, en chef de station compromis et traître, n’échappent pas aux stéréotypes. L’erreur majeure de Moon 44 est de reposer sur une énigme (qui vole les navettes terriennes et pourquoi ?) très mal exploitée, d’autant que le fameux ennemi mystérieux le reste jusqu’à la fin du film. Alfred Hitchcock disait assez justement qu’un film est d’autant plus réussi que son méchant l’est. Dans ce cas, que penser d’un long-métrage où l’antagoniste ne nous est jamais présenté ? La scène finale, pourtant conçue comme un climax spectaculaire, avec ses affrontements aériens et ses explosions en cascade, retombe donc à plat, faute d’enjeu émotionnel clair ou de véritable confrontation. Sorti en février 1990 en Allemagne de l’Ouest, Moon 44 ne connaîtra pas les honneurs d’une sortie en salles aux États-Unis, où il débarquera directement en vidéo.

 

© Gilles Penso

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