ZU, LES GUERRIERS DE LA MONTAGNE MAGIQUE (1983)

Un petit groupe de combattants décide de s’opposer au redoutable « démon de sang » qui menace de faire basculer le monde dans le chaos…

SUK SAAN : SAN SUK SAAN GIM HAP

 

1983 – Hong-Kong

 

Réalisé par Tsui Hark

 

Avec Sammo Hung, Yuen Biao, Brigitte Lin, Adam Cheng, Moon Lee, Judy Ongg, Corey Yuen, Damian Lau, Mang Hoi, Norman Chui, Chung Fat, Dick Wei

 

THEMA SORCELLERIE ET MAGIE

Pour son cinquième film en tant que réalisateur (après Butterfly Murders, Histoire de cannibales, L’Enfer des armes et All the Wrong Clues for the Right Solution), Tsui Hark concocte l’idée d’une lutte primitive entre le Bien et le Mal, une sorte de conte de fées qui se situerait dans un univers surréaliste, avec à la clé toute une série de situations extrêmes dignes d’une bande dessinée. Sa source d’inspiration officielle est le roman Legend of the Swordsmen of the Mountains of Shu (« La légende des épéistes des montagnes de Shu ») de Li Shoumin. « Pour moi, Zu doit se vivre comme une fête » dit-il en expliquant ses intentions initiales. « Imaginez que vous passiez une soirée ennuyeuse avec des invités qui vous barbent. Eh bien allez voir Zu, et vous passerez une soirée festive. » (1) Pour sortir des sentiers battus et surprendre les spectateurs, Hark décide de cultiver un humour quasi-permanent et de solliciter de nombreux effets spéciaux qui, pour la plupart, sortent du champ de compétence habituelle des productions de Hong-Kong. D’où la sollicitation de quelques ténors hollywoodiens tels que Peter Kuran et Robert Blalack, transfuges tous deux de La Guerre des étoiles. Pendant le tournage et la post-production, le cinéaste aura toutes les peines du monde à faire comprendre à son équipe les idées folles qu’il a en tête. Car Zu, les guerriers de la montagne magique ne ressemble à aucun autre film de cape et d’épée.

Au cinquième siècle, pendant la période des Seize Royaumes, d’interminables guerres civiles déchirent la Chine. Alors qu’il déserte sa troupe juste avant un assaut contre une armée ennemie, l’éclaireur Dik Ming-kei se réfugie dans une caverne sinistre, nichée à l’intérieur de la montagne Zu, où il est assailli par des vampires. Sauvé de justesse par le maître Ding Yan, il décide de devenir son élève. Lorsque tous deux tombent dans une embuscade tendue par le « démon de sang », le chasseur de démons Siu Yu et son élève Yat Jan leur viennent en aide. Mais le quatuor a toutes les peines du monde à faire le poids. « Le kung fu du démon vaut dix fois celui du juste », leur affirme le monstre avec aplomb.  Si nos guerriers parviennent à repousser la créature en enfermant provisoirement son âme dans un cocon, ils doivent désormais trouver les épées doubles pour la détruire définitivement. L’aide de la Maîtresse du « Fort Céleste » va s’avérer précieuse pour y parvenir…

Georges Méliès sous acide

Zu, les guerriers de la montagne magique prend d’abord les allures d’une comédie en costumes, pas très éloignée de l’humour absurde des Monty Pythons, comme en témoignent ces deux chefs qui n’arrivent pas à se mettre d’accord et accusent leur éclaireur de désobéir, ou ces deux duellistes qui se battent parce qu’ils n’ont pas une tenue de la même couleur. Dans le même esprit, le film s’amuse avec les archétypes du genre. « Es-tu un gentil ou un méchant ? » demande l’un des héros à un vieil inconnu. « Je suis un gentil, puisque je suis habillé en blanc ! », répond ce dernier. Lorsque Tsui Hark fait basculer son récit dans le fantastique, il n’y va pas avec le dos de la cuiller : des vampires monstrueux aux yeux lumineux qui volent comme des chauve-souris, des lianes vivantes qui s’accrochent à leurs victimes, des corbeaux maléfiques en dessin animé, des jets d’énergie dignes de Dragonball, des sourcils hypertrophiés et adhésifs, des corps qui se transforment en glace ou qui gonflent de toutes parts, des statues qui bougent et s’envolent pour servir de montures… Toutes les folies sont autorisées. Les manifestations magiques et les phénomènes surnaturels qui saturent l’écran avec une générosité boulimique, sur un rythme survolté qui ne se relâche jamais, sollicitent tous les trucages possibles et imaginables, des câbles à la rotoscopie en passant par la pyrotechnie, les maquettes, les prothèses et les incrustations. C’est presque du Georges Méliès sous acide ! Sans compter ces superbes chorégraphies qui ne cessent de défier les lois de la pesanteur et dotent les combats d’un caractère expérimental presque abstrait. Zu, les guerriers de la montagne magique fera école, poussant Tsui Hark à produire quelques années plus tard la trilogie Histoires de fantômes chinois.

 

(1) Extrait d’une interview présente dans les bonus de l’édition HK Video, en 2001.

 

© Gilles Penso

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