LA FIANCÉE DE LA JUNGLE (1958)

Soumise à des séances d’hypnose, une jeune femme perturbée découvre que dans une vie antérieure, elle était… un gorille !

THE BRIDE AND THE BEAST

1958 – USA

Réalisé par Adrian Weiss

Avec Charlotte Austin, Lance Fuller, Johnny Roth, William Justine, Jeanne Gerson, Gil Frye, Trustin Howard, Bhogwan Singh, Eve Bent, Steve Calvert, Ray Corrigan

THEMA SINGES

S’il n’est pas réalisé par Ed Wood, ce film parfaitement improbable porte indubitablement sa signature, tant dans son scenario que dans sa fabrication. Au depart, l’homme qui nous offrit les inénarrables Plan 9 From Outer Space et La Fiancée du monstre se laisse inspirer par une histoire vraie qui défraie la chronique en 1952 : au cours d’une séance d’hypnose, une certaine Virgina Tighe, femme au foyer du Colorado, découvre sa vie antérieure en tant qu’Irlandaise du 19ème siècle. Il n’en faut pas plus pour que Wood se cale derrière sa machine à écrire et concocte un de ces scénarios invraisemblables dont il a le secret. La mise en scène est confiée à Adrian Weiss, qui signa quelques épisodes de la série Craig Kennedy : criminologue, mais dont ce sera le seul long-métrage. Le gorille mis en scène dans La Fiancée de la jungle (dont le titre provisoire fut Queen Gorilla) est interprété par un habitué du genre, en l’occurrence l’acteur et cascadeur Ray « Crash » Corrigan – qui joue les primates dans une infinité de films tels que Tarzan l’homme singe, La Femme gorille, Nabonga, La Belle et la brute, White Pongo, L’Île inconnue ou Killer Ape. C’est dans La Fiancée de la jungle qu’il endosse la fourrure simiesque pour la dernière fois, ce film marquant la fin de sa carrière et son départ bien mérité à la retraite.

Dan (Lance Fuller), un chasseur de gros gibier, vient de se marier avec la ravissante Laura (Charlotte Austin). Avant leur voyage de noces prévu en Afrique, notre homme l’emmène dans son manoir où il garde en cage Spanky, un gorille qu’il a apprivoisé. Au lieu de défaillir en découvrant la bête, la jeune épouse s’écrie : « Il est magnifique ! » Le singe, lui, s’attendrit lorsqu’il la voit. Une étrange connexion semble s’établir. Mais dès qu’elle n’est plus dans son champ de vision, le primate s’agite excessivement. Au milieu de la nuit, orageuse comme il se doit, le singe finit par s’échapper et pénètre dans la chambre nuptiale. Il renifle Laura, la caresse, soulève sa robe, ce qui ne semble guère inquiéter outre-mesure la jeune femme. Dan n’est pas aussi serein. De peur qu’il ne la viole, notre chasseur se saisit d’un pistolet et abat Spanky. Après cet incident, Laura est troublée par une série de rêves fiévreux qui la transportent dans la jungle. Sous les conseils de son mari, elle se soumet à une hypnose régressive orchestrée par un psychiatre et découvre qu’elle était un gorille dans une vie antérieure !

La Belle ou la Bête ?

Un tel postulat, si loufoque soit-il, laisse imaginer des péripéties rocambolesques et des conséquences fâcheuses dans la vie du couple. Mais le film change brusquement de cap à mi-parcours. Car à partir du moment où Dan et Laura partent visiter l’Afrique, La Fiancée de la jungle est constitué à 60% d’images d’archives empruntées à un autre film, en l’occurrence Le Mangeur d’homme de Bryon Haskin (1948). Nous voilà donc dans une espèce de safari pétri de clichés colonialistes où nos héros sont filmés en train de regarder toutes sortes d’animaux hors-champ, lesquels sont artificiellement intégrés dans le montage. Autant dire que la seconde moitié du film n’est d’un intérêt que très limité, d’autant que le scénario oublie alors totalement les péripéties initiales. Ce n’est qu’à quelques minutes de la fin, alors qu’il faut bien conclure cette histoire, que l’argument de la vie antérieure ressort brusquement. Car voilà soudain un gorille tout excité qui pénètre dans le campement des héros, kidnappe une Laura consentante et l’emmène au fin fond de la jungle, sous le regard impuissant du fier chasseur ! Au milieu de ce fatras fait de bric et de brox, Ed Wood parvient tout de même à glisser les grandes tirades philosophico-scientifico-psychologiques dont il raffole tant, ainsi qu’une allusion appuyée à ses vêtements préférés : les chandails féminins en angora. On ne se se refait pas.

 

© Gilles Penso

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