LE 7ème VOYAGE DE SINBAD (1958)

Les 1001 Nuits ne pouvaient rêver plus belle transposition à l'écran, portée par le fabuleux bestiaire de Ray Harryhausen

THE 7TH VOYAGE OF SINBAD

1958 – USA

Réalisé par Nathan Juran

Avec Kerwin Matthews, Kerwin Mathews, Kathryn Grant, Richard Eyer, Torin Thatcher, Alec Mango, Danny Green, Harold Kasket 

THEMA MILLE ET UNE NUITS I DRAGONS I REPTILES ET VOLATILES I SAGA SINBAD

Un squelette vivant qui affronte à coups de sabre un prince des Mille et Une Nuits : c’est par cette image surréaliste que Ray Harryhausen, architecte des effets spéciaux du Monstre des temps perdus et des Soucoupes volantes attaquent, commença à imaginer le projet du 7ème Voyage de Sinbad. L’enjeu était pour lui important : échapper à la routine des films de monstres lâchés dans la civilisation pour s’immerger dans la fantaisie mythologique. Le héros du titre s’apprête à épouser la jolie princesse Parisa, une union qui aura le grand mérite de seller la paix entre les villes ennemies de Chandra et Bagdad. Mais pour récupérer sa lampe merveilleuse, le magicien Sokurah veut entraîner Sinbad sur l’île des Cyclopes, en réduisant Parisa au dixième de sa taille…

Depuis le magnifique Voleur de Bagdad de Ludwig Berger, jamais les contes de Mille et Une Nuits ne furent si flamboyants à l’écran. Les trucages d’Harryhausen s’adaptent à merveille à cette féerie généreuse en créatures inoubliables : une femme serpent qui annonce la Méduse du Choc des Titans un gigantesque oiseau Roc bicéphale et son « poussin », un superbe dragon quadrupède enchaîné à une grotte, et bien sûr les fameux cyclopes, entrés au panthéon des plus beaux monstres de l’histoire du cinéma fantastique. La morphologie composite de ces géants cornus à l’œil unique et aux pattes de bouc le dispute à leur férocité, ainsi qu’à leur capacité à véhiculer les influences littéraires et cinématographiques de leur créateur. Car si la capture des hommes de Sinbad par l’un de ces colosses évoque Homère, le combat final qui oppose le dragon et le cyclope nous renvoie illico à l’une des séquences les plus célèbres de King Kong. La scène d’anthologie du film demeure cependant la fameuse lutte de Sinbad contre un squelette armé d’une épée. Bernard Herrmann compose pour cette trépidante séquence un concerto pour castagnettes et xylophone, partiellement inspiré par « La Danse Macabre » de Saint-Saëns. L’ombre des classiques plane d’ailleurs souvent sur la magnifique partition du 7ème Voyage de Sinbad, notamment les tonalités orientales de la « Danse Arabe » du « Casse-Noisettes » de Tchaïkovsky qu’évoque le thème de Bagdad, ou « Le Sacre du Printemps » de Stravinsky dont on retrouve les attaques inquiétantes à chaque manifestation des pouvoirs magiques de Sokurah.

« Du pays au-delà de l'au-delà… »

A plus d’une reprise, le film plonge dans une naïveté trop pleine de charme désuet pour ne pas séduire. C’est par exemple le cas lorsque la princesse Parisa glisse à l’intérieur de la lampe magique où elle rencontre le petit génie. Assez curieusement, le film marcha partout sauf en Angleterre, où une censure apparemment très pudibonde refusa l’entrée aux enfants de moins de seize ans non accompagnés d’un adulte, sous prétexte que le squelette et le dragon étaient trop effrayants ! Cette œuvre enchanteresse restera dans les mémoires comme l’un des “must” du magicien Ray Harryhausen. « Le 7ème Voyage de Sinbad a coûté environ 650 000 dollars », nous révèle-t-il. « Ce n’est rien ! Il a rapporté des millions à la Columbia. Financièrement parlant, c’est notre plus gros succès. »  (1)

(1) Propos recueillis par votre serviteur en février 2004. 

© Gilles Penso 

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