HOSTEL (2005)

Produit par Quentin Tarantino, le second long-métrage d’Eli Roth montre jusqu’où peuvent aller les instincts les plus bas de nos semblables

HOSTEL

 

2005 – USA

 

Réalisé par Eli Roth

 

Avec Jay Hernandez, Derek Richardson, Eythor Gudjonsson, Barbara Nedelijakova, Jana Kaderabkova, Jan Vlasak, Jennifer Lim

 

THEMA TUEURS

Tout sympathique qu’il soit, Cabin Fever, le premier long-métrage d’Eli Roth, ne brillait guère par son originalité, se contentant de suivre prudemment les sentiers battus par John Boorman et Sam Raimi. Hostel, son second film, ose au contraire nous emmener sur un terrain quasiment vierge, fort d’un postulat troublant qu’on pourrait résumer ainsi : si le tourisme du sexe existe, pourquoi ne pas imaginer un tourisme de la mort ? Pourquoi une organisation clandestine ne serait-elle pas prête à fournir à des hommes riches avides de sensations nouvelles du gibier humain conçu pour être torturé et assassiné ? Une variante moins sportive et plus chirurgicale des Chasses du comte Zaroff en quelque sorte… Fan de Cabin Fever, Quentin Tarantino s’implique dans le projet en tant que producteur exécutif (son nom en gros sur les affiches est un argument publicitaire de poids), et Roth s’embarque pour un tournage de quarante jours en extérieurs naturels slovaques.

L’idée de départ d’Hostel est pour le moins audacieuse, mais pour la mettre en scène, le cinéaste prend tout son temps, infligeant aux spectateurs trois quarts d’heure de métrage franchement ennuyeux. On y découvre deux étudiants américains, Paxton et Josh, et un ami de rencontre islandais, Oli, qui traversent l’Europe, sac sur le dos, dans l’espoir de multiplier les fêtes et les conquêtes féminines. À Amsterdam, un homme leur vante les mérites des filles slovaques. Et effectivement, dès leur arrivée à Bratislava, les joyeux compères montent au septième ciel, grâce aux peu farouches Natalya et Svetlana. Mais au petit matin, l’un d’entre eux se retrouve ligoté sur une chaise rouillée dans un lieu clos aux allures d’abattoir. Alors qu’il réalise avec effroi qu’il est tombé dans un piège, notre malheureux se retrouve allègrement torturé à la perceuse et au scalpel par un détraqué impatient de jouer au docteur…

Le « torture porn » dans toute sa splendeur

Le film bascule ainsi sans crier gare dans l’horreur malsaine, glauque et graphique, empruntant les voies d’un Takashi Miike (réalisateur d’Audition), lequel fait d’ailleurs une petite apparition dans Hostel. Dommage qu’Eli Roth peine à tirer parti de son concept. L’intrigue s’avère donc erratique, et supporte mal son étirement sur la durée d’un long métrage. Ainsi, pour éprouvantes qu’elles soient, les scènes de torture perdent vite leur crédibilité lorsque le réalisateur – visiblement peu confiant en leur seul impact psychologique – croit bon de confier aux maquilleurs de l’atelier KNB la réalisation d’effets gore extrêmes dignes de Lucio Fulci. Visage brûlé au chalumeau, œil qui sort de son orbite, tête écrasée sous des rochers, doigts coupés à la tronçonneuse, tout y passe sans la moindre retenue. Hostel hésite ainsi entre plusieurs styles (survival, slasher, suspense, revenge movie, film gore) et finalement ne parvient qu’à choquer épisodiquement sans autre intention apparente. La démarche, du même coup, semble un peu vaine. Passant à côté d’une thématique aux passionnantes répercussions sociales et anthropologiques, Hostel ne se distingue plus trop, dès lors, d’un Ilsa ou d’un épisode de la série japonaise Guinea Pigs, célèbres pour leur désespérante gratuité.

 

© Gilles Penso



Partagez cet article