LE CORPS ET LE FOUET (1963)

Christopher Lee incarne un homme violent et malsain qui semble revenu d’entre les morts après son assassinat…

LA FRUSTA E IL CORPO

 

1963 – ITALIE / FRANCE

 

Réalisé par Mario Bava

 

Avec Daliah Lavi, Christopher Lee, Tony Kendall, Ida Galli, Harriet Medin, Gustavo de Nardo, Luciano Pigozzi

 

THEMA FANTÔMES

Pendant les années soixante, Christopher Lee enchaîne les films d’épouvante italiens avec une boulimie qu’explique probablement sa longue traversée du désert en début de carrière. Désormais très sollicité, il ne refuse quasiment aucune proposition et provoque des frissons sur tous les plateaux transalpins qui le réclament. En 1963, Lee retrouve ainsi le réalisateur Mario Bava. Ce dernier avait déjà dirigé le coméfdien britannique dans Hercule contre les vampires, mais il n’avait exploité que sa présence physique en lui confiant le rôle du félon Lico. Le cinéaste italien comprit rapidement que le registre de Lee était beaucoup plus riche, ce qu’il prouva dans Le Corps et le fouet. Lee y trouve l’un de ses rôles les plus troublants, celui du cruel Kurt Menliff, de retour au château familial en plein 19ème siècle. Lorsque la nouvelle épouse de son frère repousse ses avances, il la suit jusque sur la plage et la fouette jusqu’à ce qu’elle perde connaissance. Plus tard, Kurt est retrouvé éventré par un poignard, mort comme la fille de la servante qui se suicida jadis de chagrin à cause de lui. D’autres meurtres s’ensuivent, et la famille finit par se persuader que le mauvais fils est sorti du tombeau…

Le Corps et le fouet est probablement l’un des films les plus somptueux et les plus équivoques de Mario Bava. Si le rythme se fait parfois languissant, surtout dans sa dernière partie, la poésie et la beauté, en revanche, ne défaillent jamais et nimbent en permanence le film d’une aura toute particulière, à travers ses décors magnifiques (en particulier cet impressionnant château médiéval surplombant la plage), sa photographie extrêmement soignée et sa partition musicale très envoûtante, conçue surtout à partir de variantes sur une sonate pour piano. Christopher Lee forme avec la toute belle Daliah Lavi un couple maudit mémorable, dont les relations pour le moins morbides et ambiguës oscillent constamment entre la haine et l’amour, le plaisir et la douleur. A ce titre, la scène de la plage, qui donne au titre tout son sens, s’avère des plus perturbantes.

Les amants maudits

De nombreuses facéties visuelles (apparitions et disparitions de Kurt derrière une fenêtre, main crispée s’approchant de l’héroïne terrorisée, bottes souillées de tourbe égrainant le sol d’empreintes boueuses) évoquent le diptyque L’Effroyable secret du professeur Hichcock et Le Spectre du professeur Hichcock, réalisé pendant la même période par Riccardo Freda. Le dénouement du film de Bava, en forme de coup de théâtre et de révélation finale, clôt Le Corps et le fouet en beauté, alors que les flammes envahissent peu à peu le tombeau de Kurt, fils renié, frère maudit et amant fatal. Christopher Lee joua son rôle en italien mais n’était pas disponible pour se doubler lorsque fut réalisée la version anglaise du film. C’est donc Dan Sturkie qui lui prête sa voix, d’où le trouble que peivent ressentir les spectateurs anglophones habitués au timbre si spécifique de Lee. Pour l’anecdote, la plupart des membres de l’équipe du film furent sommés d’utiliser un pseudonyme pour faire croire que Le Corps et le fouet était une production anglo-saxonne. C’est ainsi que Mario Bava devint John Old, un pseudonyme qu’il réutilisa souvent par la suite.

 

© Gilles Penso

 

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