CAPTAIN MARVEL (2019)

La première super-héroïne de l’univers Marvel à bénéficier d’un long-métrage solo est une guerrière surpuissante au passé énigmatique…

CAPTAIN MARVEL

 

2019 – USA

 

Réalisé par Anna Boden et Ryan Fleck

 

Avec Brie Larson, Samuel L. Jackson, Ben Mendelsohn, Djimon Hounsou, Lee Pace, Lashana Lynch, Gemma Chan, Annette Bening, Clark Gregg, Jude Law

 

THEMA SUPER-HÉROS I EXTRA-TERRESTRES I SAGA MARVEL COMICS I MARVEL CINEMATIC UNIVERSE

Contrairement au concurrent DC, les comics Marvel n’ont jamais été réputés pour leur capacité à concevoir des super-héroïnes aussi emblématiques que leurs homologues masculins. Aucune d’entre elles n’est honnêtement susceptible de rivaliser avec une Wonder Woman ou une Catwoman par exemple. La plupart des justicières Marvel se contentent en effet d’être des versions féminines de leurs collègues (Spider-Woman, Miss Hulk, Miss Marvel) ou des faire-valoir (Black Cat, la Sorcière Rouge, la Femme Invisible). Au cinéma, cette tendance s’affirme de la même manière. Black Widow, la Guêpe et même les X-Women restent généralement cantonnées à leurs rôles d’acolytes, laissant la part belle aux mâles musclés. Il était donc temps de donner la vedette à une super-héroïne en solo. De fait, Captain Marvel est plus qu’un film au sein du Marvel Cinematic Universe, c’est un symbole. Pour marquer le coup, les responsabilités artistiques sont autant que possible féminisées (le scénario, la bande originale, le montage, la direction artistique, les costumes). Ce souci d’équité ressurgit aussi au poste de la mise en scène, partagé par le duo Anna Boden et Ryan Fleck, signataire jusqu’alors de plusieurs comédies dramatiques (Sugar, Une drôle d’histoire, Under Pressure) et d’un certain nombre d’épisodes de séries TV. Force est de constater que nos duettistes prennent leur mission à cœur, offrant à Brie Larson un rôle savoureux sans tomber dans les travers caricaturalement féministes qui gangrèneront Black Widow deux ans plus tard.

Le film commence comme un space opera mouvementé, au cœur d’un conflit entre deux races extra-terrestres : les Kree et les Skrulls. Vers, une guerrière Kree, possède un grand pouvoir (notamment des poings qui lancent des photons destructeurs) mais ne contrôle pas encore suffisamment ses émotions, ce qui amenuise considérablement son efficacité au combat. Partie en mission dans une zone hostile avec son commandant et une petite équipe de soldats pour exfiltrer l’un des leurs, elle tombe dans une embuscade. Capturée par les Skrulls qui veulent soutirer une information logée dans son cerveau, Vers s’échappe et se crashe sur la Terre de 1995. Là, elle rencontre un Nick Fury jeune (qui n’est pas encore borgne) et apprend le secret déroutant de ses propres origines. Il semblerait en effet qu’elle ait eu une vie antérieure sur Terre en tant que pilote de l’US Air Force à la fin des années 80, sous le nom de Carol Danvers. S’agit-il d’une illusion créée par les Skrulls ou possède-t-elle réellement des racines terriennes ?

« Merci Stan »

Terriblement sous-exploitée dans Kong : Skull Island où elle jouait les substituts ternes de Fay Wray, Brie Larson trouve avec Captain Marvel un rôle à sa mesure, parfait équilibre d’humour, de charme et d’énergie. Si Jude Law assure le service minimum en mentor glacial et si Ben Mendelsohn nous ressert le couplet habituel de l’antagoniste haut gradé, il faut avouer que voir Samuel L. Jackson jouer les agents spéciaux dans une intrigue située au milieu des années 90 (donc à l’époque où l’acteur crevait l’écran dans Pulp Fiction) a quelque chose d’euphorisant. En redescendant sur le plancher des vaches après son prologue spatial, le film nous offre une scène de poursuite efficace avec un métro et des véhicules de police, sous influence manifeste de French Connection. L’intrigue se pare d’éléments d’espionnage, de faux-semblants et de trahisons, le tout complexifié par le fait que les Skrulls ne cessent de changer de visage et d’imiter les traits de ceux qu’ils croisent. Les apparences sont d’ailleurs trompeuses dans le film. C’est sans doute l’un des aspects les plus intéressants du scénario, qui joue habilement sur la mécanique du souvenir parcellaire et énigmatique dont le protagoniste ne pourra reconstituer l’intégralité qu’à mi-parcours du récit. Captain Marvel manque sans doute de cohérence globale, alternant les séquences inspirées (des « dogfights » vertigineux dont l’un dans un canyon hérité de La Guerre des étoiles et Independence Day) et les moments d’humour artificiels (les facéties du « Flerken », un combat dédramatisé par l’ajout d’un tube de Gwen Stefani dans la bande son). Captain Marvel demeure un opus sympathique de la grande saga démarrée avec Iron Man, dédié à Stan Lee qui s’éteignit pendant le montage. Le film commence donc par un logo Marvel entièrement repensé en son honneur, suivi de la mention : « Merci Stan ».

 

© Gilles Penso


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