ASTÉRIX ET OBÉLIX : L’EMPIRE DU MILIEU (2023)

Pour leur cinquième aventure « live », les irréductibles Gaulois prennent les traits de Guillaume Canet et Gilles Lellouche…

ASTÉRIX ET OBÉLIX : L’EMPIRE DU MILIEU

 

2023 – FRANCE

 

Réalisé par Guillaume Canet

 

Avec Guillaume Canet, Gilles Lellouche, Jonathan Cohen, Vincent Cassel, Julie Chen, Leanna Chea, Marion Cotillard, Pierre Richard, Ramzy Bedia, José Garcia

 

THEMA SORCELLERIE ET MAGIE I SAGA ASTÉRIX ET OBÉLIX

Si les deux premiers volets de la saga cinématographique Astérix avaient su très correctement emplir les tiroirs caisses, on ne peut pas dire qu’Astérix aux jeux olympiques et Astérix et Obélix : Au service de Sa Majesté aient rameuté les foules. Face à ce constat mitigé, il était clair qu’un renouvellement s’imposait. Anne Goscinny elle-même, fille du grand René en charge de faire fructifier l’œuvre de son père, estimait qu’il était grand temps de rajeunir le casting. Or si le petit Gaulois moustachu avait déjà plusieurs fois changé de visage (Christian Clavier, Clovis Cornillac, Édouard Baer), son comparse ventripotent et bon-vivant avait jusqu’alors invariablement conservé les traits bonhommes de Gérard Depardieu. À 75 ans, il semblait logique que le Cyrano de Rappeneau raccroche le menhir. Le ravalement de façade s’opère à l’initiative de Guillaume Canet qui – une fois n’est pas coutume – n’adapte aucun album de la BD mais écrit un scénario original avec Julien Hervé et Philippe Mechelen : Astérix et Obélix : l’empire du milieu (un terme qui évoque à la fois Star Wars, Le Seigneur des anneaux et bien sûr la Chine elle-même, occasion manifeste de rendre hommage aux films d’arts martiaux dont Alain Chabat se moquait déjà allègrement dans une séquence mémorable de Mission Cléopâtre). Le réalisateur s’octroie le rôle principal aux côtés de son compère Gilles Lellouche, qui a la lourde tâche de nous faire oublier la prestation imposante de Depardieu.

C’est l’inimitable voix off de Gérard Darmon, basse et profonde comme il se doit, qui nous guide dans cette nouvelle aventure. Nous sommes en 50 avant Jésus-Christ et l’impératrice de Chine (Linh-Dan Pham) est emprisonnée à la suite d’un coup d’État fomenté par Deng Tsin Qin (Bun Hay Mean), un prince félon. Aidée par Graindemaïs (Jonathan Cohen), un marchand phénicien, et par sa fidèle guerrière Tat Han (Leanna Chea), la princesse Fu Yi (Julie Chen), fille unique de l’impératrice, s’enfuit pour demander de l’aide aux irréductibles Gaulois. Voilà pour l’entrée en matière. Or dès les premières minutes, on sent bien que quelque chose cloche. Guillaume Canet, sous le casque d’un Astérix maussade et dépressif, arbore un immuable regard de chien battu. Gilles Lellouche, engoncé dans son costume grossissant, débite ses dialogues avec une voix débilitante et des expressions niaises dans l’espoir de trouver les intonations qui conviendraient le mieux à Obélix. Pierre Richard, sous la défroque du vénérable Panoramix, interrompt brutalement une séquence pour se prêter à un clin d’œil à La Chèvre qui tombe comme un cheveu dans la soupe. Manifestement pas dans son élément, Canet a toutes les peines du monde à trouver la juste tonalité.

« Ne raconte pas de salades à César ! »

Partagé entre l’envie d’apporter du sang neuf à la saga inspirée par Goscinny et Uderzo et celle de retrouver la recette miracle appliquée par Alain Chabat sur Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre, Astérix et Obélix : l’empire du milieu multiplie les guest-stars tous azimuts (comédiens, chanteurs, humoristes, footballeurs, youtubeurs) mais cette tendance au remplissage n’a pas plus d’efficacité que le navrant défilé de sportifs qui faisait la queue pendant l’épilogue d’Astérix aux jeux olympiques. La pauvreté des dialogues, le manque d’originalité des gags, les jeux de mots affligeants (« Ne raconte pas de salades à César ! ») et la conviction toute relative des acteurs n’arrangent rien. Ni Vincent Cassel en César malingre, ni Marion Cotillard en Cléopâtre adultère, ni même Jonathan Cohen en faux blond phénicien (qui vole pourtant la vedette à tout le monde, comme souvent) ne parviennent à tirer leur épingle du jeu et à s’extraire du carcan caricatural où les enferme le film. Pour couronner le tout, malgré toute la sympathie que l’on peut éprouver pour Matthieu Chédid, force est de constater que le talentueux chanteur est un bien piètre compositeur de bande originale (discipline dans laquelle Jean-Jacques Goldman avait lui-même montré ses limites avec Astérix et Obélix contre César). C’est donc à un ratage quasi complet que nous convie hélas Astérix et Obélix : la terre du milieu, bien incapable de justifier à l’écran le budget pharaonique de 66 millions d’euros mis à sa disposition.

 

© Gilles Penso


Partagez cet article