SPIDER-MAN ACROSS THE SPIDER-VERSE (2023)

Encore plus loin, encore plus fort, encore plus fou, encore plus de Spider-Men ! Une suite qui ne recule devant aucune surenchère…

SPIDER-MAN ACROSS THE SPIDER-VERSE

 

2023 – USA

 

Réalisé par Joaquin Dos Santos, Kemp Powers et Justin K. Thompson

 

Avec les voix de Shameik Moore, Hailee Steinfeld, Brian Tyree Henry, Lauren Vélez, Jake Johnson, Jason Schwartzman, Issa Rae

 

THEMA SUPER-HÉROS I SAGA MARVEL COMICS I SPIDER-MAN

Le miracle de Spider-Man New Generation allait-il se produire une seconde fois ? La fraîcheur, l’originalité, la folie, les incroyables audaces artistiques et narratives du film précédent ne risquaient-elles pas de perdre de leur spontanéité à l’occasion d’une suite s’efforçant de retrouver les mêmes ingrédients et la même alchimie ? Si le premier film était le fruit d’un pari osé sans aucune garantie de succès, il faut désormais composer avec les énormes attentes d’un public qui espère beaucoup et a revu à la hausse le niveau de ses exigences. Le scénario prend le parti de nous surprendre dès l’entame en adoptant non pas le point de vue de Miles Morales mais celui de Gwen Stacy – du moins celle qui vit dans un univers où son alter-ego est Spider-Woman, très éloignée donc du personnage qui vécut et mourut dans les comic books des années 70 consacrés à l’homme-araignée. Son destin et celui de Miles se croisent à nouveau, non seulement à cause des nouveaux dangers qui guettent les multivers mais aussi parce que leurs parcours et leurs difficultés personnelles entrent en résonnance. Ainsi, si Spider-Man Across the Spider-Verse entend bien redoubler d’inventivité dans la mise en scène de ses séquences d’action, il approfondit aussi ses personnages pour mieux explorer leurs états d’âme, leurs failles et le difficile choc des générations inhérent à l’âge de l’adolescence.

Cette nouvelle exploration des univers parallèles sollicite l’emploi d’une multitude de styles esthétiques qui sautent aux yeux des spectateurs avec un foisonnement à deux doigts de nous donner le tournis. Car à trop vouloir surpasser son modèle, Spider-Man Across the Spider-Verse a des tendances boulimiques qui finissent par se révéler contre-productives. Autant être honnête, nous frôlons parfois la crise d’épilepsie ! Certes, le film est une merveille visuelle qui prend presque les allures d’un showcase de tout ce que le pop’art a pu produire depuis le début des années 60. Revers de la médaille : le spectateur perd parfois le fil, tant subjugué par cette performance artistique en perpétuelle mutation qu’il finit par relâcher son implication dans l’intrigue elle-même. Ce problème se répercute sur tous les aspects du film, y compris dans son accumulation de personnages. Si Spider-Man New Generation nous offrait une demi-douzaine de versions alternatives du tisseur de toiles, ici, ce sont des milliers de Spider-Men qui se déchaînent simultanément à l’écran, du plus « nostalgique » (celui du dessin animé des années 60) au plus invraisemblable (la variante punk).

Spidey dans tous ses états

Cette surenchère déborde bien sûr de générosité, mais c’est plutôt dans les moments intimistes que Spider-Man Across the Spider-Verse parvient à nous captiver, en particulier lorsque ses jeunes héros se confrontent à leurs parents et s’efforcent maladroitement de ne pas rompre le fil de la communication. L’un des enjeux majeurs du personnage tel qu’il fut initialement créé par Stan Lee et Steve Ditko est la non-révélation de son identité secrète et les innombrables dilemmes qui en découlent. Si le Marvel Cinematic Universe a fait le choix – très discutable – de se passer de cette problématique (tout le monde finit par savoir que Spidey et Peter Parker ne font qu’un), le film de Joaquin Dos Santos, Kemp Powers et Justin K. Thompson en fait l’un de ses moteurs dramatiques clés. C’est lorsqu’il se débarrasse de son trop-plein de clins d’œil et d’effets graphiques et qu’il revient à une forme plus pure de narration que Spider-Man Across the Spider-Verse s’avère le plus prenant et le plus touchant. Au bout de plus de deux heures de péripéties tumultueuses, le film s’achève en plein cliffhanger, nous promettant une suite palpitante sous le titre Spider-Man Beyond the Spider-Verse.

 

© Gilles Penso


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