VICE-VERSA (2015)

Que se passe-t-il exactement dans la tête d’une jeune fille en pleine crise d’adolescence ? La réponse est franchement surprenante !

INSIDE OUT

 

2015 – USA

 

Réalisé par Pete Docter et Ronnie del Carmen

 

Avec les voix de Amy Poehler, Lewis Black, Mindy Kaling, Bill Hader, Phyllis Smith, Kaitlyn Dias, Diane Lane, Kyle MacLachlan, Lori Alan, Paris Van Dyke

 

THEMA CONTES I SAGA PIXAR

L’histoire de Riley Anderson, une fille de dix ans bouleversée par son déménagement à San Francisco dû aux nouvelles obligations professionnelles de son père, est à priori naturaliste et dénuée de tout élément fantastique. A priori seulement. Car les petits génies de Pixar ont choisi de nous raconter les tourments de la jeune collégienne depuis l’intérieur de sa tête. Or dans le scénario co-écrit par Pete Docter et Michael Arndt, le cerveau humain ressemble à une espèce de tour de contrôle où s’efforcent de cohabiter cinq personnages hauts en couleur représentant les cinq émotions « de base » telles que les ont définies les psychologues : la joie, la tristesse, la peur, la colère et le dégoût. Vice-Versa est donc un de ces « films concepts » dont les créateurs de Toy Story se sont fait une spécialité mais qui, généralement, sont déclinés sous forme de courts-métrages. On se souvient encore avec enthousiasme des lampes vivantes de Luxo Jr, des états d’âme du bonhomme de neige de Knick-Knack, des tours de prestidigitation hilarants de Presto ou de l’affrontement de la lumière et de l’obscurité dans Jour et nuit. Le principe narratif incroyablement audacieux de Vice-Versa allait-il parvenir à nous captiver pendant une heure et demie ?

Au début, le doute est permis. Les bons sentiments règnent en effet dans la vie et dans l’esprit de Riley, sous la supervision de son émotion principale, c’est-à-dire la joie. La famille, l’amitié, le sport, l’honnêteté sont donc les valeurs positives que semble glorifier le film avec une béatitude presque suspecte. Mais ce n’est qu’un leurre. Car dans la tête de la préadolescente, le chaos commence à s’immiscer, et dès lors tout son équilibre – en même temps que celui du film – se met à vaciller. Tandis que dans le quartier général qui lui sert de cerveau, un enchaînement d’incidents tourne à la catastrophe, dans sa vie quotidienne le trouble est semé, et plus rien ne sera désormais comme avant. La fausse naïveté cède ainsi le pas à un constat d’une grande lucidité : lorsque l’individu quitte la petite enfance pour tendre vers l’adolescence, toutes les vérités qui semblaient absolues se disloquent, et la dépression guette ceux qui ne sauraient gérer les vents contraires de leurs émotions.

Voyage au centre de la tête

Il fallait être particulièrement téméraire pour oser traiter un sujet aussi adulte, aussi sérieux et aussi intime sous l’angle d’une aventure fantastique déjantée à grand spectacle. Mais Pete Docter, déjà réalisateur de Monstre et compagnie et Là-haut, n’est plus à un défi près. Dans l’esprit de Riley, le parcours du combattant de la joie et de la tristesse, perdues toutes deux dans les méandres de son subconscient, de ses sentiments refoulés, de ses phobies et de ses cauchemars, se transforme en odyssée mouvementée à mi-chemin entre « Alice au pays des merveilles » et « Voyage au centre de la Terre ». Véritable traité psychanalytique doublé d’un conte tout public rythmé par la musique trépidante de Michael Giacchino, Vice-Versa porte la marque des plus grandes réussites de Pixar, l’un des seuls studios capables d’offrir des films offrant à ses spectateurs autant de niveaux de lectures et autant d’innovations. Et pour prouver que l’alchimie a fonctionné à merveille, l’épilogue nous tire autant de larmes de joie que de tristesse, comme si les deux personnages principaux du film s’étaient invités dans notre propre esprit !

 

© Gilles Penso


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