

Un petit garçon abruti de jeux vidéo croise la route d’un tueur psychopathe masqué et, croyant avoir affaire au diable, lui propose de l’assister…
SATAN’S LITTLE HELPER
2004 – USA
Réalisé par Jeff Lieberman
Avec Alexander Brickel, Katheryn Winnick, Stephen Graham, Amanda Plummer, Wass Stevens, Dan Ziskie, Melisa McGregor
THEMA TUEURS
Réalisateur de quelques films d’horreur insolites dans les années 70 et 80 (Le Rayon bleu, La Nuit des vers géants, Survivance), Jeff Lieberman était ensuite tombé dans l’anonymat du téléfilm avant de signer le scénario de L’Histoire sans fin 3. Ce contre-emploi total s’était soldé par un terrible échec artistique en 1994. Dix ans plus tard, il revient des limbes avec un projet pour le moins improbable : Au service de Satan. Ce film marque un retour à priori inespéré, bricolé avec un budget microscopique et une liberté absolue. Loin des modes de son époque – found footage, torture porn, remakes en série -, Lieberman conçoit un conte noir qui tente d’équilibrer la satire sociale, la farce macabre et l’horreur pure. S’il n’a plus les moyens de ses ambitions visuelles d’autrefois, le réalisateur garde intact son goût du décalage. L’action se déroule sur Bell’s Island, petite bourgade américaine paisible, où le jeune Douglas Whooly passe ses journées à jouer à un jeu vidéo intitulé Satan’s Little Helper. Le principe consiste à incarner l’assistant du diable et commettre un maximum de crimes pour engranger des points. Tout va bien jusqu’au soir d’Halloween, lorsque sa grande sœur Jenna rentre au bercail avec son nouveau petit ami, Alex. Jaloux et vexé de ne pas avoir sa sœur pour lui seul, Douglas s’enfuit en proclamant qu’il veut se « donner à Satan ».


Sur sa route, notre jeune protagoniste croise une silhouette inquiétante affublée d’un masque de diable, en train de disposer un cadavre sur un perron. L’enfant, persuadé d’avoir trouvé son idole, propose spontanément ses services à celui qu’il croit être le vrai Satan. Le tueur, muet et impassible, accepte avec un hochement de tête. Ensemble, ils entament dès lors une tournée meurtrière à travers la ville, Douglas croyant participer à un gigantesque jeu grandeur nature. À partir de là, Lieberman déroule une suite de séquences bizarres. Le duo improbable sème la mort en plein jour, sous les regards amusés des passants qui croient assister à des blagues d’Halloween. Le tueur écrit « BOO » avec le sang de ses victimes, pend une vieille femme à sa véranda, renverse un aveugle et une femme enceinte avec un chariot, sous le regard hilare de Douglas. Lorsque le tueur se fait passer pour Alex et rentre à la maison, le film joue la carte du suspense mâtiné de malaise. Car Jenna, croyant avoir affaire à son petit ami déguisé, se laisse séduire par un Satan silencieux qui la déshabille du regard.
Le masque du diable
Sous ses atours de série B farfelue, Au service de Satan prend les allures d’une satire au vitriol du monde contemporain. Lieberman y fustige une société anesthésiée par les écrans, où l’horreur devient spectacle et où la mort ne choque plus personne. Le tueur masqué reste muet, comme un avatar vidéoludique. Et Douglas, petit joueur déboussolé, symbolise une génération incapable de distinguer la violence simulée de la violence réelle. Côté interprétation, Katheryn Winnick (future Lagertha de Vikings) s’en tire honorablement, tandis qu’Amanda Plummer apporte une étrangeté bienvenue en mère décalée. Mais l’enfant héros, volontairement insupportable, nous laisse perplexes. Trop naïf pour émouvoir, trop bête pour inquiéter, il constitue un bien piètre protagoniste. Comment dès lors s’identifier à lui ? Cette faiblesse dramatique majeure, ajoutée à de nombreuses longueurs en milieu de film, empêche Au service de Satan d’atteindre pleinement son potentiel. La première partie nous amuse par son ton irrévérencieux, mais la seconde s’enlise de plus en plus, avant qu’un dernier acte jouissif ne tente un peu tardivement de rattraper l’ensemble. Voir Jeff Lieberman revenir à ses premières amours est toujours agréable, même si l’on aurait préféré un résultat plus abouti et plus convaincant.
© Gilles Penso
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