

Une jeune femme s’est liée d’amitié avec un crabe mutant grand comme un dinosaure qui sème la panique dans une petite ville américaine…
QUEEN CRAB
2015 – USA
Réalisé par Brett Piper
Avec Michelle Miller, Kathryn Metz, Richard Lounello, Ken Van Sant, A.J. DeLucia, Danielle Donahue, Steve Diasparra, Yolie Canales, Houston Baker, Liberty Asbury
THEMA INSECTES ET INVERTÉBRÉS
Brett Piper n’a jamais laissé le manque de moyens entamer son opiniâtreté. Avec un budget d’à peine 60 000 dollars et l’appui de son producteur Mark Polonia, ce véritable couteau suisse (réalisateur, scénariste, co-producteur, superviseur des effets spéciaux) se lance dans Queen Crab, qui s’appréhende autant comme un hommage aux films de Ray Harryhausen que comme un clin d’œil aux kaiju-eigas japonais dans lesquels les monstres ne sont pas forcément plus agressifs que les humains. Dans une démarche proche de celle de tous les films qu’il a signés depuis le début des années 2000 (Arachnia, Shock-O-Rama, The Dark Sleep), notre homme ne se laisse pas tenter par l’image de synthèse. S’il est passionné de créatures géantes, il souhaite continuer à les concevoir et à les animer en stop-motion, à l’ancienne, comme il le faisait à l’époque de Mystérieuse planète ou A Nymphoïd Barbarian on Dinosaur Hell. Voilà qui distingue agréablement Queen Crab de tous les « creature features » à petit budget qui pullulent alors sur le marché du « direct-to-video ». Le film se déroule à Crabbe Creek, dans l’Amérique profonde. Le père de la petite Melissa est un scientifique qui travaille sur un moyen d’accroître la taille de la nourriture pour régler les futurs problèmes de famine, comme jadis le capitaine Nemo de L’Île mystérieuse. Or la fillette vient de recueillir au bord de l’eau un gros crabe qu’elle surnomme Pee-Wee.


Dès ce prologue, alors qu’il a encore une taille normale, le crabe est animé en stop-motion dans un certain nombre de plans. L’animation est très subtile, pleine de caractère, et l’incrustation de la figurine dans les plans avec la petite fille est remarquable. Puis deux événements aux lourdes conséquences s’enchaînent : Melissa donne à Pee-Wee des grains de raisin génétiquement modifiés, et plusieurs produits chimiques se mélangent par accident dans le laboratoire en provoquant une explosion qui tue ses parents. Vingt ans plus tard, Melissa est devenue une jeune femme peu sociable (incarnée par Michelle Miller) qui vit seule dans la campagne et a noué des liens fusionnels avec son crabe favori, devenu aussi grand qu’un dinosaure. Dès lors, Brett Piper met en scène une série de séquences surréalistes au cours desquelles des crabes de tailles variés (car il y a des rejetons) s’en prennent aux humains. Tout commence avec l’attaque d’un homme dans les bois, au milieu de la nuit. Des crustacés gros comme des chats se jettent sur lui et le tuent puis prennent en chasse une jeune femme. Lorsque les bêtes sont écrasées par une voiture, la maman réclame alors vengeance…
La grande aventure de Pee-Wee
Car Pee-Wee est une femelle, ce qui explique le titre du film. Sa première apparition sur une route nocturne est très dramatique, face à un pare-brise avec à l’avant-plan un regard affolé dans le rétroviseur. La bête s’intègre avec beaucoup de dynamisme dans les plans réels et son design est assez intéressant. Si sa forme globale s’inspire grandement du crabe de L’Île mystérieuse, son faciès est humanisé avec deux grands yeux et une bouche dans laquelle s’articulent deux mandibules très expressives. Grâce à l’emploi d’une pince grandeur nature, de décors miniatures très réalistes, de figurines pour remplacer certains humains et de nombreux plans en mouvement, Piper nous surprend sans cesse et parvient à faire interagir chaque fois que possible les acteurs et le monstre. Parmi les moments les plus marquants du film, on retiendra la destruction d’une ferme par une mère crabe furieuse, la créature qui soulève entre ses pinces gigantesques une jeep pour la jeter au sol (un clin d’œil manifeste au climax du Scorpion noir) ou encore Melissa qui est transportée sur le dos de son crustacé favori et traverse ainsi la forêt au clair de lune. Voilà donc un petit film de monstre très sympathique, dont les maladresses et les défauts sont d’autant plus pardonnables qu’il ne place jamais ses ambitions au-delà de celles d’un honnête divertissement de série B.
© Gilles Penso
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