RUNNING MAN (2025)

38 ans après la version kitsch avec Schwarzenegger, Edgar Wright se réapproprie le roman de Stephen King et lui offre l’adaptation idéale…

THE RUNNING MAN

 

2025 – USA

 

Réalisé par Edgar Wright

 

Avec Glen Powell, Emilia Jones, Josh Brolin, Katy O’Brian, Lee Pace, Colman Domingo, William H. Macy, Michael Cera, David Zayas, Jayme Lawson

 

THEMA FUTUR I SAGA STEPHEN KING

Décidément, Stephen King n’en finit pas de hanter les écrans. Après le bouleversant Life of Chuck de Mike Flannagan et l’éprouvant Marche ou crève de Francis Lawrence, Running Man s’invite à son tour dans la course, sous la houlette d’un réalisateur qu’on n’attendait pas forcément sur ce terrain : Edgar Wright. Le pari étant d’autant plus risqué que l’ombre du film de 1987 réalisé par Paul Michael Glaser, avec un Arnold Schwarzenegger caricatural en combinaison rouge pétard, continue de planer sur l’imaginaire collectif. Mais cette fois, pas question d’arènes fluo ni de gladiateurs de bande dessinée. Wright remonte à la source, celle du roman publié sous le pseudonyme Richard Bachman qu’il découvrit à l’âge de 14 ans et dont il souhaite retrouver l’esprit subversif et la hargne. Le réalisateur de Shaun of the Dead et Last Night in Soho réussit le miracle d’injecter dans le récit une folle énergie propre à son style turbulent – montage millimétré, ruptures de ton, écarts humoristiques – sans pour autant s’éloigner de la plume de King. Cette quête de fidélité pousse Wright à se réapproprier des éléments du roman qui pourraient sembler parfaitement anachroniques dans un récit d’anticipation, notamment l’obligation pour le héros d’enregistrer ses messages vidéo sur cassette et de les envoyer par la poste. Ce décalage, parfaitement assumé, nous plonge dans une sorte d’univers rétro-futuriste.

En tête d’affiche, Glenn Powell assure, impeccable dans la peau de ce Ben Richards en cavale dont la rage contenue n’efface pas son caractère profondément sympathique. Après Top Gun : Maverick et Twisters, l’acteur confirme sa capacité à conjuguer le physique athlétique et l’intensité dramatique. À ses côtés, Josh Brolin impose son autorité carnassière en directeur de chaîne télévisée au sourire éclatant et au cynisme inoxydable. Quant à Colman Domingo (Fear the Walking Dead), il est comme un poisson dans l’eau sous la défroque du présentateur TV gouailleur et excessif. Sa prestation haute en couleur s’éloigne du jeu de Richard Dawson, son prédécesseur des années 80, lequel mimait tant le Michel Piccoli du Prix du danger que le film de Glaser écopa d’un procès fort médiatisé, orchestré – et finalement gagné – par Yves Boisset. Même William H. Macy (Pleasantville, Fargo) s’invite pour un petit rôle savoureux.

La course à la mort de l'an 2025

Comme toujours, Edgar Wright truffe sa mise en scène virtuose de morceaux d’anthologie (la poursuite vertigineuse dans l’hôtel de Boston, le climax dans l’avion), motivé par l’une des idées maîtresses du roman : la falsification des images pour pouvoir faire avaler au public tout et son contraire. Le film de 1987 effleurait à peine le sujet pour mieux se concentrer sur les combats de gladiateurs opposant l’ex-Terminator à des ennemis tous plus exubérants les uns que les autres. Mais Wright tient à retrouver non seulement l’essence mais aussi la forme du texte. Et si les derniers rebondissements du film peuvent sembler excessifs, pour ne pas dire difficiles à avaler, ils reprennent quasiment à la lettre la prose de King. Le cinéaste aurait-il péché par excès de fidélité ? Peut-être. Il n’empêche que cette vision d’un monde privant les citoyens de leurs libertés individuelles les plus élémentaires nous semble encore plus d’actualité qu’à l’époque où le roman fut publié. Preuve que King, entre deux récits d’horreur plus allégoriques, faisait preuve d’une inquiétante préscience au regard de la société. Le hasard faisant d’ailleurs très bien les choses, le roman se situait en 2025, précisément l’année de sortie du film.

 

© Gilles Penso

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