LE MONDE PERDU (1925)

Le Jurassic Park des années 20 est une adaptation spectaculaire du célèbre roman d'Arthur Conan Doyle

THE LOST WORLD

1925 – USA

Réalisé par Harry O’Hoyt

Avec Bessie Love, Lewis Stone, Wallace Beery, Lloyd Hughes, Alma Bennett, Arthur Hoyt, Bull Montana 

THEMA DINOSAURES

Après avoir créé le célébrissime détective Sherlock Holmes, le romancier Sir Arthur Conan Doyle imagina un nouveau personnage de caractère, l’excentrique professeur Challenger, héros de cinq romans. Le premier et le plus connu de la série fut « Le Monde Perdu », publié en 1912. Le savant et son expédition y exploraient un plateau inconnu du Brésil et y rencontraient de gigantesques sauriens ayant survécu à travers les âges. En 1922, le producteur américain Watherson Rothacker se lança dans l’adaptation cinématographique de la première aventure du professeur Challenger, et livra aux spectateurs un monument du cinéma fantastique exotique. Bien sûr, il est difficile d’apprécier Le Monde Perdu à sa juste valeur si on ne tient pas compte de l’époque à laquelle il fut présenté au public, absolument pas préparé à un spectacle aussi surprenant. La première partie du film, destinée à présenter les personnages, emprunte un ton des plus légers, n’hésitant pas par moments à se référer au burlesque très en vogue dans les années 20 (la glissade maladroite du journaliste Malone dans les bureaux de rédaction, puis son combat clownesque contre Challenger). Les motivations et les caractères des personnages, si importants dans le texte de Conan Doyle, disparaissent presque ici, en raison du handicap du muet mais aussi de l’insipidité relative des comédiens.

Les dinosaures constituent donc le principal intérêt du film, et ils sont franchement étonnants. Aussi nombreux que variés, ils fourmillent sur le plateau amazonien qu’explorent les héros, vaquant à leur occupation préférée, le combat inter-espèces. La sensation de vie due à la technique de l’animation image par image fait des miracles. À vrai dire, les créatures sont animées avec plus ou moins de bonheur selon que le superviseur des effets spéciaux Willis O’brien lui-même ou que l’un de ses assistants se soit attelé à la tâche, mais certains passages portent indubitablement l’empreinte du futur créateur de King Kong. Il faut avouer que les scènes de dinosaures s’intercalent assez artificiellement avec celles des acteurs, lesquels n’apparaissent en même temps qu’eux que rarement, par le biais de petits caches en bas des images.

Un brontosaure lâché dans Londres

Dans le roman de Conan Doyle, le professeur Challenger et son équipe finissaient par ramener à Londres un petit ptérodactyle pour prouver la véracité de leur récit. Dans le film, c’est carrément un brontosaure de 20 mètres de long qui est rapatrié en ville ! Bien entendu, il ne tarde pas à s’échapper et à semer la panique. La destruction finale des rues de Londres qui s’ensuit annonce du coup une prolifique descendance de monstres dévastateurs, King Kong et Godzilla en tête. Le film sortit le 15 février 1925, accompagné d’une publicité tapageuse qui le qualifia de « la plus grande attraction que vos yeux aient jamais vus ». Le public et la critique l’encensèrent immédiatement et en firent le blockbuster de l’année. Conan Doyle se prêta même à un petit canular auprès de la Société des Magiciens qu’il fréquentait, laissant croire à ses amis que les dinosaures présents dans le film étaient réels ! Il faut dire qu’en ces temps héroïques, les effets spéciaux n’étaient pas aussi médiatisés que de nos jours.

 

© Gilles Penso

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