FONDU AU NOIR (1980)

Un jeune homme obsédé par le cinéma se transforme en tueur en série dont les meurtres s’inspirent de ses films préférés

FADE TO BLACK

 

1980 – USA

 

Réalisé par Vernon Zimmerman

 

Avec Dennis Christopher, Tim Thomerson, Gwynne Gilford, Normann Burton, Linda Kerridge, Morgan Paull, James Luisi

 

THEMA CINÉMA ET TÉLÉVISION I TUEURS

Avec Fondu au noir, le réalisateur et scénariste Vernon Zimmerman nous offre un slasher d’un genre très spécial, très éloigné de la tendance amorcée avec La Nuit des masques et surexploitée par la saga Vendredi 13 et ses imitations. Le sous-genre déjà formaté des psycho-killers était pourtant alors en plein essor. Eric Binford, cinéphile invétéré fan de polars des années 30 et 40 et de films d’épouvante, vit avec sa tante Stella, qui s’occupe de lui depuis la mort de sa mère. Il travaille dans un laboratoire de cinéma et passe tout son temps libre à regarder des films. De brefs extraits de longs-métrages en noir et blanc traduisent ses états d’âme, avec une décennie d’avance sur la série Dream On qui fera de ce mécanisme narratif son leitmotiv. L’Étrange créature du lac noir, Le Carrefour de la mort, La Nuit des Morts-Vivants ou Le Cauchemar de Dracula se bousculent ainsi dans sa tête et érodent peu à peu sa perception de la réalité.

Un jour, Eric fait la connaissance d’une ravissante jeune femme qui ressemble comme deux gouttes d’eau à Marilyn Monroe. Mais un soir où elle lui pose un lapin, poussé à bout par sa tante paralytique, il tue cette dernière comme dans l’extrait du Carrefour de la mort qu’il est en train de regarder et bascule dans la psychose. Il passe alors de l’autre côté de l’écran pour se transformer en une sorte d’ange exterminateur référentiel. Maquillé comme Bela Lugosi dans Dracula, il provoque la mort d’une jeune femme dont il suce ensuite le sang. Déguisé en cowboy masqué, il vide le chargeur de son pistolet sur son collègue Richie (joué par un tout jeune Mickey Rourke !). Costumé comme Lon Chaney Jr dans les séquelles de La Momie, il provoque la crise cardiaque de son patron. Déguisé en mafieux d’un autre âge, il mitraille un producteur qui lui a volé une idée de film. Le film s’offre aussi un hommage appuyé à Psychose, et notamment à l’incontournable séquence de la douche. Le jeune homme s’inspire ainsi des héros du cinéma qui l’obsèdent pour se créer des alter-égo agressifs capables de prendre sa revanche à sa place, de le venger de ceux qui l’ont trahi, frustré ou humilié. Et tandis qu’il se livre à une croisade sanglante, un psychologue intègre un commissariat pour mener l’enquête.

Le miroir aux illusions

Même s’il manque parfois de finesse et s’encombre au cours de sa première partie de dialogues explicatifs laborieux (comment est morte la mère d’Eric, comment sa tante est devenue paralytique, pourquoi elle a hérité de sa garde), Fondu au noir exerce une certaine fascination. La prestation de Dennis Christopher (révélé dans La Bande des quatre de Peter Yates) est franchement étonnante. Son désespoir face à un grand écran blanc, lorsqu’il semble réaliser qu’il ne s’agit que d’un tissu à projeter des illusions, est presque palpable. En toute logique, le climax se déroule dans un cinéma, en l’occurrence le fameux Chinese Theater sur Hollywood Boulevard, et nous renvoie à celui de King Kong, dont il reprend le caractère inéluctable et pathétique. Ce sera le seul véritable titre de gloire de Vernon Zimmerman, qui disparaîtra du paysage hollywoodien après ce coup d’éclat insolite.

 

© Gilles Penso

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